2022 — Rapports 5 à 8 de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du Canada — Déclaration d’ouverture de la vérificatrice générale du Canada à la conférence de presse

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Bonjour et merci de vous joindre à moi. J’aimerais d’abord souligner que nous nous trouvons sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinaabe.

Quand je considère les quatre rapports d’audit de performance que nous avons livrés aujourd’hui, il s’en dégage un fil conducteur en ce que les organisations gouvernementales sont souvent lentes à utiliser efficacement les moyens à leur disposition pour produire les meilleurs résultats possibles pour tous et toutes. Comme ces audits le démontrent, les résultats ont toujours une vaste portée. Parfois, ce sont les populations les plus vulnérables qui sont touchées de manière disproportionnée par l’incapacité des organisations fédérales à gérer activement les problèmes.

Voyons d’abord notre rapport sur la gestion des situations d’urgence dans les collectivités des Premières Nations.

Nous avons constaté que Services aux Autochtones Canada n’avait pas fourni aux collectivités des Premières Nations le soutien dont elles avaient besoin pour gérer les situations d’urgence, par exemple inondations et feux de forêt, dont la fréquence et la gravité ne cessent d’augmenter. Les situations d’urgence ont une incidence disproportionnée sur un bon nombre de collectivités des Premières Nations, en raison de leur éloignement physique ou de leur contexte socioéconomique.

Au cours des quatre derniers exercices, Services aux Autochtones Canada a dépensé environ 828 millions de dollars pour gérer des urgences. Les mesures prises par le Ministère étaient systématiquement plus réactives que préventives. Les dépenses liées à ses activités d’intervention et de rétablissement en cas d’urgence ont été environ trois fois et demie plus élevées que celles visant à aider les collectivités à prévenir ces situations et à s’y préparer. Selon Sécurité publique Canada, pour chaque dollar investi dans la préparation et l’atténuation, six dollars peuvent être économisés en coûts d’intervention et de rétablissement après une urgence.

Les collectivités des Premières Nations ont recensé de nombreux projets d’infrastructure qui permettraient d’atténuer les conséquences des situations d’urgence. Services aux Autochtones Canada a un arriéré de 112 projets approuvés, mais qui attendent d’être financés. Le financement et la réalisation de ces projets approuvés, par exemple des ponceaux et des digues pour prévenir les inondations saisonnières, aideraient à réduire les répercussions sur les personnes et le coût des activités d’intervention et de rétablissement en cas d’urgence.

Nous avons signalé bon nombre des problèmes que nous soulevons aujourd’hui dans notre audit de 2013 sur la gestion des urgences dans les réserves. C’est avec frustration que je constate qu’il y a eu peu ou pas d’amélioration près d’une décennie plus tard. Par exemple, Services aux Autochtones Canada n’a toujours pas établi quelles collectivités des Premières Nations ont le plus besoin de soutien pour gérer les urgences. Si le Ministère identifiait ces collectivités, il pourrait cibler ses investissements en conséquence.

Je vais passer maintenant à notre audit de la cybersécurité des renseignements personnels dans le nuage. L’audit visait à examiner si les organisations fédérales sélectionnées avaient mis en place des contrôles appropriés pour prévenir et détecter les événements liés à la sécurité qui pourraient compromettre les renseignements personnels de la population canadienne stockés dans le nuage, et pour y réagir.

Lorsque les organisations fédérales décident de stocker les renseignements personnels des Canadiennes et des Canadiens dans le nuage, il leur incombe de protéger ces renseignements. Pour ce faire, elles sont censées mettre en place un ensemble de contrôles de base définis par le gouvernement du Canada. L’audit a révélé que ces contrôles n’avaient pas été mis en place ni surveillés de manière uniforme dans les ministères que nous avons examinés. Comme les cyberattaques sont de plus en plus fréquentes et perfectionnées partout dans le monde, les lacunes dans les contrôles augmentent le risque d’atteintes à la sécurité.

Nous avons également constaté que même s’il y a quatre ans que le Secrétariat du Conseil du Trésor a demandé aux organisations fédérales d’envisager le recours à l’informatique en nuage, il n’avait toujours pas fourni de plan de financement à long terme pour l’adoption de cette technologie. Il n’a pas non plus donné aux organisations gouvernementales les outils dont elles ont besoin pour calculer le coût de la transition à des applications infonuagiques et celui de sécuriser l’information qui y est stockée. Ces outils sont nécessaires pour que ces organisations puissent formuler des plans et s’assurer d’avoir la main‑d’œuvre, l’expertise et les ressources dont elles ont besoin pour sécuriser et protéger l’information.

Le gouvernement doit agir maintenant, alors que les ministères en sont encore aux premières étapes de la transition vers l’informatique en nuage, afin de renforcer les contrôles qu’il utilise pour prévenir et détecter les cyberattaques, et pour y répondre.

Le caractère adéquat des outils et des technologies était également préoccupant dans notre audit de la surveillance des eaux arctiques. Dans le cadre de cet audit, nous avons examiné si les organisations fédérales avaient obtenu les outils et acquis la connaissance du domaine maritime nécessaires pour surveiller le trafic dans la région et réagir aux incidents de sûreté et de sécurité.

Le réchauffement climatique accroît l’accessibilité des eaux arctiques canadiennes et ouvre des débouchés économiques, par exemple dans les secteurs de l’exploitation minière, de la pêche commerciale et du tourisme. Ces nouveaux débouchés suscitent l’intérêt d’investisseurs étrangers et stimulent la concurrence dans la région mais augmentent aussi la probabilité d’accès non autorisés, d’incidents de sécurité, de pêche illégale et de pollution marine.

Nous avons constaté que le gouvernement n’avait pas agi afin de régler les problèmes de longue date qui nuisent à la surveillance des eaux arctiques canadiennes. Les organisations fédérales responsables de la sûreté et de la sécurité de la région de l’Arctique ont donc une vue incomplète de la circulation maritime dans la région.

Les lacunes qui touchent la surveillance des eaux arctiques et les préoccupations liées aux équipements vieillissants du Canada sont connues depuis des années. Notre audit a montré que ces enjeux persistent. Le renouvellement des navires, des aéronefs, des satellites et des infrastructures qui permettent de surveiller le trafic maritime et de répondre aux incidents de sûreté et de sécurité a pris du retard au point que certains cesseront probablement leurs activités avant d’être remplacés.

Par exemple, les brise‑glaces et l’avion‑patrouilleur vieillissants de Transports Canada et de la Garde côtière canadienne approchent de la fin de leur durée de vie utile. Bien que des plans aient été amorcés pour les remplacer, il n’y a pas de plan de contingence si la livraison des navires de remplacement est de nouveau retardée. Cela pourrait compromettre la présence du Canada dans les eaux arctiques.

Le gouvernement doit s’attaquer sans tarder aux problèmes de longue date relevés dans notre audit pour favoriser le renouvellement durable des équipements et protéger les intérêts du Canada dans l’Arctique, y compris la capacité de réagir aux menaces et aux incidents.

Passons maintenant à notre dernier rapport d’audit, qui porte sur l’itinérance chronique. Cet audit visait à déterminer si Emploi et Développement social Canada et Infrastructure Canada avaient pris des mesures pour prévenir et réduire l’itinérance chronique.

Nous avons aussi examiné si la Société canadienne d’hypothèques et de logement avait contribué à cet objectif en offrant des programmes et des services fédéraux de logement qui visent à combler les besoins et à améliorer les conditions de logement des groupes vulnérables au Canada, y compris les personnes qui vivent en situation d’itinérance chronique.

Notre audit a révélé que cinq années après le lancement de la Stratégie nationale sur le logement du gouvernement fédéral, aucune organisation fédérale n’a encore assumé la responsabilité d’atteindre la cible canadienne visant à prévenir et à réduire l’itinérance chronique de moitié d’ici 2028. De plus, les organisations ne savaient pas si leurs efforts jusqu’à présent avaient amélioré les conditions de logement pour les groupes vulnérables du Canada.

Par exemple, la Société canadienne d’hypothèques et de logement, en tant que responsable de la Stratégie nationale sur le logement, a dépensé environ la moitié des quelque 9 milliards de dollars qu’elle avait engagés au titre de la Stratégie, mais elle ignorait si les personnes les plus démunies bénéficiaient des initiatives. En effet, la Société n’avait pas mesuré les changements à l’égard des conditions de logement pour les groupes vulnérables prioritaires, y compris les personnes en situation d’itinérance.

Nous avons aussi constaté que des logements locatifs construits en vertu de la Stratégie et que la Société considérait comme abordables étaient souvent inabordables pour les ménages à faible revenu et les groupes vulnérables. De plus, la Société n’avait pas évalué si les personnes les plus démunies bénéficiaient de logements.

Je m’inquiète particulièrement du manque d’imputabilité à l’échelon fédéral en ce qui concerne l’atteinte de la cible canadienne visant à couper de moitié l’itinérance chronique d’ici 2028. Infrastructure Canada et la Société canadienne d’hypothèques et de logement devraient coordonner leurs efforts en vue d’atteindre les objectifs de la Stratégie nationale sur le logement et de veiller à ce que les personnes et les familles aient un endroit où se loger.

Je vous remercie de votre attention. Je suis maintenant prête à répondre à vos questions.