2015 mars — Rapport du vérificateur général du Canada Les services correctionnels au Nunavut — Ministère de la Justice

2015 mars — Rapport du vérificateur général du Canada Les services correctionnels au Nunavut — Ministère de la Justice

Table des matières

Introduction

Information générale

1. Le ministère de la Justice est chargé des services correctionnels du Nunavut, aux termes de la Loi sur les services correctionnels de 1988 et de son règlement. Au sein du Ministère, ce sont les Services correctionnels qui s’occupent des probations, des libérations conditionnelles, de l’aide à la réadaptation et des services en établissement pour adultes. Aux termes de la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents fédérale et de la Loi sur les jeunes contrevenants du Nunavut, les Services correctionnels sont aussi chargés de la détention des jeunes contrevenants ainsi que de leur surveillance dans la collectivité lorsqu’ils sont remis en liberté. Les Services correctionnels ont pour mission de protéger la société en exerçant un contrôle raisonnable sur les contrevenants et en leur offrant une variété de programmes pour les aider à devenir des citoyens respectueux des lois.

2. Le Nunavut compte les six établissements correctionnels suivants :

Détention provisoire — Mesure prise à l’encontre d’une personne inculpée devant un tribunal qui a ordonné sa détention en attendant sa prochaine comparution.

Ces établissements correctionnels accueillent des personnes placées en détention provisoire ou condamnées à des peines de prison de moins de deux ans. Le Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik et une unité du Centre de guérison de Rankin Inlet servent de placement transitoire aux détenus qui achèvent de servir leur peine. Au moment de notre audit, un nouvel établissement, le Centre Makigiarvik, était en chantier. Au cours de cette période, le Nunavut comptait également cinq camps éloignés où des détenus peuvent purger une partie de leur peine (voir la pièce 1).

Pièce 1 — Le Nunavut compte divers établissements correctionnels

Hommes adultes

Établissement et emplacement Année d’ouverture Niveau de sécurité 1  Usage actuel Capacité d’accueil Taux moyen d’occupation
Exercice 2013-2014
Centre correctionnel de Baffin (Iqaluit) 1986 Minimal 2  Centre à sécurité minimale, moyenne et maximale qui reçoit des détenus condamnés et des prévenus en détention provisoire. 68 82
Centre de guérison de Rankin Inlet (Rankin Inlet) 2013 Moyen Centre à sécurité minimale et moyenne qui reçoit des détenus condamnés et des prévenus en détention provisoire. Il est axé sur la réadaptation. L’unité Inukshuk sert de placement transitoire pour les détenus avant leur libération. 48 23
Centre Kugluktuk Ilavut (Kugluktuk) 2005 Minimal Centre à sécurité minimale. Il est axé sur la guérison et la réinsertion sociale, un peu comme une maison de transition. 15 8
Centre Makigiarvik (Iqaluit) 2015
(date d’ouverture prévue)
Minimal Centre à sécurité minimale qui recevra aussi les détenus souffrant de problèmes de santé mentale. 48 Sans objet
Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik (Iqaluit) 2000 Minimal (maison de transition) Maison de transition qui sert également de placement transitoire pour les détenus avant leur libération. 14 10
Camps éloignés (divers emplacements) 1999 Non précisé Camps qui favorisent la guérison en enseignant aux contrevenants des compétences traditionnelles et en leur offrant des services de counselling traditionnels. 8 4

Femmes adultes

Établissement et emplacement Année d’ouverture Niveau de sécurité1 Usage actuel Capacité d’accueil Taux moyen d’occupation
Exercice 2013-2014
Centre correctionnel pour femmes du Nunavut (Iqaluit) 2010 Moyen Centre à sécurité minimale et moyenne qui reçoit des détenues condamnées et des prévenues en détention provisoire. 8 6

Centre de détention pour jeunes

Établissement et emplacement Année d’ouverture Niveau de sécurité1 Usage actuel Capacité d’accueil Taux moyen d’occupation
Exercice 2013-2014
Centre de détention pour jeunes contrevenants Isumaqsunngittuk-kuvik (Iqaluit) 1989 Niveaux multiples Reçoit les jeunes (hommes et femmes) qui ont été condamnés à des peines de détention en milieu ouvert ou fermé, ou qui sont en détention provisoire. 12 7

 1  Un établissement correctionnel est conçu pour recevoir des détenus soumis à des niveaux de sécurité particuliers, ce qui influence la conception de l’infrastructure de l’établissement. Le niveau de sécurité de l’établissement détermine également les mesures de contrôles auxquelles sont assujettis les détenus. Les niveaux présentés reposent sur les renseignements communiqués par le ministère de la Justice.

 2  Des représentants du Ministère nous ont informés qu’en 1996, une firme d’architectes avait été embauchée afin de concevoir des améliorations à l’établissement, notamment en augmentant le niveau de sécurité dans certains secteurs. Toutefois, des rapports subséquents (y compris un rapport rédigé en 2010 par une firme d’ingénieurs) indiquent que le Centre correctionnel de Baffin ne satisfait toujours qu’aux exigences de base en matière de sécurité pour un établissement correctionnel à sécurité minimale.

Source : Données communiquées par le ministère de la Justice du Nunavut

3. Selon la Loi sur les services correctionnels et son règlement, le Ministère, par l’entremise de ses Services correctionnels, doit assurer la gestion des établissements correctionnels, notamment leur fonctionnement dans les meilleures conditions de sécurité. Il incombe aussi au Ministère d’offrir des programmes de traitement et de formation aux détenus en vue de favoriser leur réadaptation. Les services de santé mentale destinés aux détenus sont gérés en vertu de la Loi sur la santé mentale de 1988. Les administrateurs des établissements correctionnels doivent s’assurer que des services psychologiques sont offerts aux détenus.

4. Les services correctionnels sont importants au Nunavut. Selon Statistique Canada, le Nunavut a enregistré le deuxième plus haut taux de criminalité du pays en 2013. Les données du Ministère montrent que 658 adultes de sexe masculin ont été admis dans les établissements correctionnels au cours de l’exercice 2013-2014, dont 433 au Centre correctionnel de Baffin et 126 au Centre de guérison de Rankin Inlet. Ce nombre comprend à la fois les admissions en détention provisoire et les admissions en détention après condamnation, de même que les transfèrements. Les détenus masculins au Nunavut sont en grande majorité inuits.

5. Au cours de l’exercice 2013-2014, le Ministère a alloué plus de 32 millions de dollars (soit 32 % de son budget) aux Services correctionnels. Cette somme comprenait près de 22 millions de dollars qui ont été consacrés à l’application des peines de détention. Durant ce même exercice, le Ministère a consacré 10,5 millions de dollars à l’exploitation du Centre correctionnel de Baffin et 6,7 millions de dollars à l’exploitation du Centre de guérison de Rankin Inlet. En 2013, les Services correctionnels comptaient 190 employés permanents à temps plein, dont 60 au Centre correctionnel de Baffin et 45 au Centre de guérison de Rankin Inlet. Ces centres sont les deux plus grands établissements correctionnels du territoire.

6. Le Ministère vise notamment à disposer de suffisamment de places pour recevoir tous les détenus du Nunavut sur le territoire. Au cours des 15 dernières années, cependant, la capacité d’accueil des centres de détention pour hommes n’a pas suivi le rythme du taux d’incarcération du Nunavut. Entre 2001 et 2011, le nombre moyen d’hommes nunavummiuts incarcérés au Canada est passé de 90 à 147. Or, il y avait 103 places dans les centres correctionnels pour hommes en 2011 au Nunavut. Le Ministère doit donc payer pour l’incarcération de certains détenus nunavummiuts hors du territoire, dans le cadre d’ententes sur les services partagés. Au cours de l’exercice 2012-2013, 33 détenus adultes de sexe masculin du Nunavut, en moyenne, ont été incarcérés à l’extérieur du territoire. Depuis 2010, le ministère de la Justice a construit deux nouveaux établissements correctionnels pour adultes : le Centre correctionnel pour femmes du Nunavut et le Centre de guérison de Rankin Inlet pour hommes. De plus, la construction du Centre Makigiarvik (pour hommes) est en cours.

7. Le Nunavut est toujours aux prises avec d’importants enjeux sociaux : pénurie de logements, traumatismes laissés par le système de pensionnats, taux de suicide élevé et faible niveau de scolarité, entre autres. Les recherches établissent un lien entre les problèmes de santé mentale dont souffrent les Nunavummiuts et la toxicomanie et l’alcoolisme, qui à leur tour entraînent la perpétration de crimes.

Objet de l’audit

8. Le présent audit visait essentiellement à déterminer si le ministère de la Justice du Nunavut s’acquittait de ses principales responsabilités à l’égard des détenus au sein du système correctionnel. Nous avons vérifié si le Ministère avait :

9. Cet audit est important parce que la criminalité pose un problème majeur au Nunavut. Depuis 2001, le taux de criminalité et la population carcérale ont fortement progressé. Le système correctionnel joue donc un rôle essentiel pour protéger la population en assurant la surveillance des détenus en vue de leur réadaptation.

10. Nous n’avons pas examiné les services judiciaires, les peines prononcées, les services correctionnels communautaires, la prise en charge des détenus hors du territoire, ni les programmes de justice communautaire. Nous n’avons pas non plus audité la gestion de la prise en charge des femmes et des jeunes contrevenants placés en détention.

11. La section intitulée À propos de l’audit, à la fin du présent rapport, donne des précisions sur les objectifs, l’étendue, la méthode et les critères de l’audit.

Constatations, recommandations et réponses

La gestion des établissements correctionnels

12. Dans l’ensemble, nous avons constaté que le ministère de la Justice ne s’était pas acquitté de manière adéquate de ses principales responsabilités en ce qui a trait à la gestion des établissements correctionnels du Nunavut. Le Ministère connaît depuis près de 20 ans les besoins criants des centres correctionnels et il a pris certaines mesures pour les combler. Il a notamment fait construire le Centre de guérison de Rankin Inlet et le Centre Makigiarvik, au coût total d’environ 53 millions de dollars. Même si ces établissements vont permettre de réduire quelque peu la surpopulation carcérale, ils ne comblent pas les besoins les plus cruciaux des centres de détention du territoire : le manque de locaux appropriés (notamment d’unités à sécurité maximale) et le mauvais état du Centre correctionnel de Baffin. Les problèmes recensés à ce Centre incluent des trous dans les murs, la présence de moisissure, des infractions au Code national de prévention des incendies et l’incarcération de détenus présentant une cote de sécurité moyenne ou maximale dans un établissement à sécurité minimale. Toutes ces conditions continuent à mettre en péril la sécurité des détenus et du personnel.

13. Cette constatation est importante parce qu’aux termes de la Loi sur les services correctionnels et de son règlement, le Ministère est chargé d’assurer le fonctionnement des établissements correctionnels, et ce, dans les meilleures conditions de sécurité. Cela s’inscrit dans son mandat qui est de prendre en charge les détenus tout en protégeant la société. Le Ministère doit s’acquitter de ses principales obligations pour s’assurer que les détenus sont incarcérés et supervisés de manière adéquate afin de favoriser leur réadaptation et leur réinsertion sociale dans la communauté.

14. La principale prison du Nunavut, le Centre correctionnel de Baffin, a ouvert ses portes en 1986, il y a près de 30 ans. Depuis 1998, le nombre de crimes violents au Nunavut est considérablement plus élevé que la moyenne nationale. De graves préoccupations ont été formulées à l’égard du Centre, notamment par le Bureau de l’enquêteur correctionnel du gouvernement fédéral. Ce Bureau est l’ombudsman pour les contrevenants sous responsabilité fédérale. Au début de 2013, au lendemain de l’ouverture du Centre de guérison de Rankin Inlet, le Bureau de l’enquêteur correctionnel a accepté la demande des Services correctionnels de procéder à un examen de l’infrastructure et des fonctionnalités du Centre correctionnel de Baffin du point de vue des droits de la personne. Le Bureau a confirmé les conclusions de nombreux rapports internes et externes antérieurs en indiquant que l’infrastructure matérielle du Centre n’était sécuritaire ni pour les détenus ni pour le personnel correctionnel, ce qui empêchait les Services correctionnels de s’acquitter de leur mandat. Dans son rapport, le Bureau préconisait la fermeture du Centre et son remplacement par un ou plusieurs nouveaux établissements.

Le ministère de la Justice n’a pas répondu aux besoins les plus criants de son système correctionnel

15. Nous avons constaté que le ministère de la Justice connaissait depuis de nombreuses années les graves lacunes du principal établissement correctionnel du territoire, le Centre correctionnel de Baffin. Malgré tout, il a investi dans la construction du Centre de guérison de Rankin Inlet et du Centre Makigiarvik. Ces deux établissements vont certes permettre de réduire quelque peu la surpopulation carcérale, mais ils ne répondent pas aux besoins les plus cruciaux du système correctionnel : le manque de locaux appropriés (notamment d’unités à sécurité maximale) et le mauvais état du Centre correctionnel de Baffin. La documentation qui justifiait la stratégie adoptée par le Ministère ne nous a pas été communiquée.

16. Notre analyse à l’appui de cette constatation rend compte de ce que nous avons examiné et aborde les problèmes recensés, les plans élaborés pour répondre aux besoins en matière d’incarcération, les mesures prises, le Centre de guérison de Rankin Inlet, le Centre Makigiarvik et les rénovations prévues au Centre correctionnel de Baffin.

17. Cette constatation est importante parce que les besoins actuels et à venir des détenus dans les centres correctionnels du Nunavut ne sont pas encore comblés. Par exemple, le Centre correctionnel de Baffin est toujours surpeuplé, ce qui entraîne les risques que l’on connaît pour la sécurité, et il n’y a toujours pas d’unité à sécurité maximale pour les détenus. Il est primordial que le Ministère consigne en dossier les raisons qui appuient ses décisions relatives aux dépenses en immobilisations, faute de quoi il n’y a pas de stratégie systématique pour répondre aux besoins les plus criants des centres correctionnels du territoire.

18. De plus, selon la Loi sur les services correctionnels, les Services correctionnels sont chargés d’assurer la détention et la garde légale en toute sécurité des détenus incarcérés dans les centres correctionnels.

19. Notre recommandation relativement au secteur examiné est présentée au paragraphe 48.

20. Ce que nous avons examiné — Nous avons vérifié si le Ministère de la Justice avait évalué ses besoins actuels et à venir en matière d’établissements correctionnels et s’il avait élaboré des plans adéquats pour les combler.

21. Les problèmes recensés — Nous avons constaté que le Ministère connaissait depuis de nombreuses années les graves lacunes du Centre correctionnel de Baffin. Le Centre a en effet fait l’objet de divers rapports et études depuis 1996, notamment un rapport du Bureau de l’enquêteur correctionnel. Ces rapports ont souligné les limites fonctionnelles du Centre, ainsi que les problèmes qui menacent la sécurité des détenus et du personnel, notamment :

22. Le ministère de la Justice examine depuis des années les problèmes qui sévissent dans les centres correctionnels. Il a recruté un expert-conseil qui a été chargé d’élaborer un plan stratégique pour les services correctionnels. Ce plan a été achevé en 2002. Au cours des onze années qui ont suivi, le même expert-conseil a rédigé plusieurs autres rapports sur les centres correctionnels du territoire. Selon le Ministère, les services de cet expert-conseil ont coûté environ 400 000 dollars. En 2006 et en 2007, les rapports de l’expert-conseil soulignaient les lacunes chroniques du Centre correctionnel de Baffin. En 2012, il a élaboré la stratégie pour les établissements correctionnels du Nunavut et donné des conseils sur la planification de ces derniers. Il a recommandé la construction d’un établissement central pour hommes de 160 places qui serait divisé en petites unités de divers niveaux de sécurité, notamment pour les prévenus en détention provisoire et les détenus présentant une cote de sécurité maximale, dans le but de mieux gérer la population carcérale.

23. Les plans élaborés pour répondre aux besoins en matière d’incarcération — La planification en matière d’investissement du Ministère pour l’exercice 2006-2007 prévoyait le financement de nouveaux centres de détention. Il y était entre autres question de la construction d’un nouveau centre de guérison pouvant accueillir de 20 à 24 personnes dans la région de Kivalliq et du remplacement du Centre correctionnel de Baffin par un centre de 72 places à Iqaluit, doté d’une unité pour les prévenus en détention provisoire, d’une unité à sécurité maximale et d’une unité à sécurité moyenne et minimale. Les projets de construction des deux établissements ont été planifiés conformément aux recommandations de l’expert-conseil embauché pour évaluer les besoins des établissements correctionnels du territoire.

24. Les mesures prises — Nous avons constaté que le Ministère avait recensé des mesures à prendre pour répondre aux besoins cruciaux en matière d’incarcération des détenus. Il a cependant adopté une stratégie différente qui n’était pas totalement adaptée à ces besoins. Le Ministère n’a pas été en mesure de nous fournir de documents pour expliquer son revirement. Les mesures prises à terme sont les suivantes :

25. Le Centre de guérison de Rankin Inlet — Le Centre de guérison de Rankin Inlet a ouvert ses portes en janvier 2013. Selon les données du Ministère, sa construction aurait coûté environ 37 millions de dollars, qui ont été financés à même les fonds réservés pour le remplacement du Centre correctionnel de Baffin, qui n’a pas eu lieu.

26. Le Centre de guérison de Rankin Inlet peut accueillir 48 hommes : 32 dans l’unité à sécurité moyenne et 16 dans l’unité à sécurité minimale. Il compte aussi des salles qui sont réservées à la prestation de programmes, notamment de réadaptation, ou à des activités récréatives. Le Centre loge ensemble les prévenus en détention provisoire et les détenus condamnés. Nous n’avons pas reçu d’explications documentées pour justifier la construction de cet établissement à niveaux de sécurité minimale et moyenne. Le Centre de guérison de Rankin Inlet contribuera à réduire la surpopulation carcérale en accueillant certains détenus de niveau de sécurité moyenne ou minimale, mais il n’est pas doté de l’espace requis pour incarcérer adéquatement les détenus de niveau de sécurité maximale. Or, ce besoin est recensé depuis 1996.

27. Le Centre Makigiarvik — Le Ministère avait prévu à l’origine de construire un centre correctionnel provisoire. Il s’agissait d’une solution à court terme pour réduire le surpeuplement du Centre correctionnel de Baffin. Le Ministère voulait ainsi alléger les pressions exercées sur le système correctionnel du Nunavut jusqu’à la réfection complète du Centre correctionnel de Baffin et la construction d’un nouvel établissement permanent à sécurité maximale à Iqaluit.

28. Le centre correctionnel provisoire devait pouvoir accueillir en tout temps de 44 à 50 détenus de niveau de sécurité minimale pendant dix ans tout au plus. Il devait ensuite être converti en espace à bureaux, en entrepôt ou servir pour les activités récréatives ou les programmes des détenus. Au cours de la conception du projet, il a été déterminé que le climat nordique du territoire présentait des risques pour la construction d’une structure temporaire. Résultat : le centre provisoire construit pour régler les problèmes de surpopulation pendant dix ans est devenu une infrastructure de secours permanente, dont la durée de vie prévue est de 30 ans. Le centre a par la suite été baptisé Makigiarvik.

29. La construction du Centre Makigiarvik aura coûté environ 16 millions de dollars. Ce Centre est conçu pour recevoir 48 détenus de niveau de sécurité minimale, notamment ceux qui souffrent de troubles mentaux et qui ont des besoins plus lourds. C’est en raison de contraintes budgétaires que le centre ne pourra accueillir que des détenus de niveau de sécurité minimale. Tout comme le Centre de guérison de Rankin Inlet, le Centre Makigiarvik contribuera à réduire la surpopulation carcérale en accueillant certains détenus de niveau de sécurité minimale, mais il ne sera pas doté de l’espace requis pour incarcérer adéquatement les détenus de niveau de sécurité maximale.

30. Les deux nouveaux centres, le Centre Makigiarvik et le Centre de guérison de Rankin Inlet, vont donc permettre de compenser certaines des lacunes relevées au sein du Centre correctionnel de Baffin (voir la pièce 2). Ils ne permettront cependant pas de répondre pleinement aux besoins prévus des centres correctionnels du Nunavut en matière de capacité d’occupation. En 2012, le Ministère prévoyait que le Nunavut aurait besoin de 268 places d’ici 2026. Même avec les 96 places supplémentaires du Centre Makigiarvik et du Centre de guérison de Rankin Inlet, il lui manquera environ 70 places. Compte tenu de cette situation, le gouvernement du Nunavut devra donc continuer de payer d’autres provinces ou territoires pour faire incarcérer certains des détenus du territoire. Cette solution ne sera toutefois réalisable que si les centres correctionnels des provinces et des autres territoires ont la place nécessaire pour recevoir les détenus du Nunavut.

Pièce 2 — Le Centre de guérison de Rankin Inlet et le Centre Makigiarvik ne permettent pas de corriger toutes les lacunes du Centre correctionnel de Baffin

Graves lacunes du Centre correctionnel de Baffin relevées dans divers rapports et études Lacunes du Centre correctionnel de Baffin corrigées grâce aux nouveaux centres
Surpopulation carcérale À court terme
Incapacité de séparer les détenus présentant des cotes de sécurité différentes, y compris les personnes placées en détention provisoire Partiellement
Absence de conditions de sécurité de base pour les détenus présentant une cote de sécurité moyenne Partiellement
Absence de conditions de sécurité de base pour les détenus présentant une cote de sécurité maximale Non
Manque d’espaces réservés à la prestation des programmes Partiellement
Hébergement de détenus dans le gymnase Oui
Mauvais état du bâtiment, notamment des trous dans les murs Non
Incapacité de désinfecter correctement les cellules, les toilettes et les douches Oui
Présence de moisissure et piètre qualité de l’air Non
Non-conformité au Code national de prévention des incendies Non

31. Les rénovations prévues au Centre correctionnel de Baffin — Le Ministère n’a pas remplacé le Centre correctionnel de Baffin, comme il prévoyait le faire dans son plan d’investissement pour l’exercice 2006-2007. De plus, un projet d’étude d’une valeur de 300 000 dollars, qui visait à examiner la modernisation, l’agrandissement et le remplacement possible du Centre correctionnel de Baffin, a été supprimé du budget des dépenses en immobilisations du Ministère pour l’exercice 2010-2011 par l’Assemblée législative.

32. Le ministère de la Justice propose aujourd’hui de rénover le Centre correctionnel de Baffin afin de pouvoir incarcérer adéquatement des détenus de niveau de sécurité maximale et corriger les lacunes structurelles qui perdurent. Le Ministère estime qu’il faudra environ 8,8 millions de dollars pour rendre le Centre conforme au Code national de prévention des incendies et à d’autres codes de sécurité. Le Ministère n’a toutefois pas encore estimé le coût des rénovations nécessaires pour construire l’unité à sécurité maximale dont a besoin le Centre.

33. Au moment de notre audit, aucun fonds n’avait été approuvé pour la réfection du Centre correctionnel de Baffin. Nous avons constaté que le Ministère n’avait pas encore élaboré de plan pour procéder à la réfection du Centre tout en continuant à y incarcérer des détenus. De plus, nous n’avons trouvé aucun plan pour la construction d’une unité à sécurité maximale au sein du Centre pouvant accueillir les détenus du Nunavut.

Les conditions d’incarcération des détenus au Centre correctionnel de Baffin mettent en péril la sécurité des détenus et du personnel

34. Nous avons constaté que les conditions d’incarcération des détenus dans le principal centre correctionnel du territoire mettaient en péril la sécurité des détenus et du personnel correctionnel :

35. Notre analyse à l’appui de ces constatations rend compte de ce que nous avons examiné et aborde les niveaux de sécurité et les prévenus en détention provisoire, la surveillance, le placement en isolement, la contrebande d’objets interdits, les examens de sécurité et les plans d’urgence, les lacunes relevées en matière de sécurité et les exercices d’évacuation d’urgence.

36. Cette constatation est importante parce que le Ministère est chargé, aux termes de la Loi sur les services correctionnels, d’assurer la prise en charge des détenus de façon sécuritaire dans les centres correctionnels. Il se doit aussi de veiller à ce que les détenus soient incarcérés dans le respect des règles de sécurité applicables et d’assurer leur sécurité et celle du personnel correctionnel. Or, l’incarcération mixte de diverses catégories de détenus pose des problèmes sur le plan de la sécurité. Cette pratique de détention augmente en effet le risque que des détenus soient exposés à des actes de violence. Vu la nature même des établissements correctionnels, les détenus sont vulnérables et comptent sur le Ministère pour assurer le respect des politiques et procédures visant à protéger leur sécurité, surtout pendant les situations d’urgence.

37. Nos recommandations relativement aux secteurs examinés sont présentées aux paragraphes 48, 58, 59, 66 et 69.

38. Ce que nous avons examiné — Nous avons vérifié si le ministère de la Justice avait surveillé la conformité aux politiques et procédures de sécurité sélectionnées. Nous avons aussi examiné si certaines exigences en matière de sécurité avaient été respectées et la manière dont l’information connexe avait été utilisée.

39. Nous avons aussi vérifié si le ministère de la Justice avait défini les rôles et responsabilités concernant les inspections de prévention des incendies et les inspections sanitaires réalisées par les diverses autorités compétentes; s’il avait reçu la confirmation que les inspections avaient bel et bien été réalisées; et si la direction du Centre avait donné suite aux recommandations formulées dans les rapports d’inspection et autres rapports sur la sécurité. Nous avons aussi examiné si le Ministère avait défini les rôles et responsabilités en ce qui concerne les exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie et s’il avait obtenu la confirmation que la direction du Centre respectait les exigences à cet égard et avait bel et bien mené les exercices requis.

40. Les niveaux de sécurité et les prévenus en détention provisoire — Nous avons constaté que les conditions d’incarcération au Centre correctionnel de Baffin mettaient en péril la sécurité des détenus et du personnel correctionnel. Les détenus doivent être évalués dès leur admission afin de déterminer leur cote de sécurité. Après avoir examiné un échantillon de 21 détenus incarcérés au Centre, nous avons constaté que la majorité d’entre eux avaient été soumis à une telle évaluation. Nous avons cependant constaté que les détenus n’étaient pas incarcérés en fonction de leur cote de sécurité, contrairement à ce que prévoient les propres directives du Ministère. Notre examen nous a permis de constater qu’un seul détenu avait été incarcéré conformément à la cote de sécurité qui lui avait été attribuée (minimale) lors de son évaluation initiale.

41. Le Centre correctionnel de Baffin ne peut incarcérer adéquatement que des détenus ayant une cote de sécurité minimale, car il s’agit d’un établissement à sécurité minimale qui n’a pas été conçu pour recevoir des détenus dont la cote de sécurité est moyenne ou maximale. Cela comprend les prévenus en détention provisoire qui, selon les directives du Centre, doivent recevoir la cote de sécurité maximale dès leur admission en détention après condamnation.

42. Les directives sur les services correctionnels indiquent également que les prévenus en détention provisoire peuvent être incarcérés avec des détenus condamnés seulement s’ils signent un formulaire de renonciation dans lequel ils donnent leur accord. Nous avons constaté que les prévenus en détention provisoire n’avaient pas été incarcérés séparément des détenus condamnés et que les formulaires de renonciation obligatoires n’avaient pas été utilisés. Le Bureau de l’enquêteur correctionnel a noté que l’incarcération des prévenus en détention provisoire avec les détenus condamnés n’était pas une bonne pratique de détention.

43. De plus, nous avons constaté qu’il était difficile de séparer les détenus en raison du surpeuplement du Centre. Selon le dénombrement des détenus fait par le Ministère à la mi-octobre 2013, environ le quart des détenus du Centre correctionnel de Baffin se sont vu attribuer une cote de sécurité maximale. L’incarcération mixte de détenus de niveaux de sécurité différents accroît le risque que des détenus non violents soient exposés à des détenus violents. Pour maîtriser ce risque, les détenus sont déplacés entre les diverses unités du Centre au cas par cas, en fonction de leur cote de sécurité, de leur comportement et de leurs rapports avec les autres détenus. Des représentants du Ministère nous ont informés que le temps que le personnel consacre à jongler constamment avec le placement des détenus pourrait être réaffecté à d’autres tâches, notamment à la gestion de cas.

44. Des détenus ont dit à la direction du Centre craindre que l’incarcération de détenus ayant besoin de protection avec les autres détenus ne les expose à des risques de violence physique. La direction du Centre a indiqué que l’incarcération mixte est le résultat du surpeuplement du Centre.

45. Le nombre d’incidents au Centre correctionnel de Baffin a augmenté au fil des ans. Par exemple, le nombre d’agressions physiques contre des détenus, des membres du personnel ou des visiteurs est passé de 57 au cours de l’exercice 2002-2003 à 185 au cours de l’exercice 2012-2013. Il y a aussi eu une recrudescence des actes d’incivilité et d’indiscipline, qui sont passés de 119 au cours de l’exercice 2002-2003 à 159 au cours de l’exercice 2012-2013.

46. Par ailleurs, les conditions de détention au Centre correctionnel de Baffin limitent la capacité du Ministère à assurer la gestion de cas auprès des détenus incarcérés dans cet établissement (voir les paragraphes 114 à 144).

47. Incarcérer de manière appropriée les détenus de niveau de sécurité moyenne et maximale est une obligation légale pour le ministère de la Justice. Les solutions possibles pour s’acquitter de cette obligation comprennent la construction des établissements requis au Nunavut ou le recours aux provinces ou à d’autres territoires. Le Bureau du vérificateur général reconnaît que l’incarcération appropriée des détenus de niveau de sécurité moyenne et maximale nécessitera des ressources financières considérables.

48. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait doter le territoire d’un nombre suffisant de places à sécurité maximale et s’assurer que les détenus de niveau de sécurité moyenne et les prévenus en détention provisoire sont incarcérés de manière adéquate, soit en faisant appel aux provinces ou à d’autres territoires, soit en construisant des établissements au Nunavut.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. La construction du Centre Makigiarvik se poursuit et son ouverture est toujours prévue pour le printemps 2015. Même si ce Centre ne sera pas doté de places à sécurité maximale, son ouverture est une première mesure qui permettra d’accroître la capacité d’occupation.

Des plans sont établis pour évaluer la viabilité et les besoins en fonction du type d’incarcération : les détenus de niveau de sécurité moyenne et maximale et les prévenus en détention provisoire. Cette évaluation permettra d’actualiser les évaluations antérieures en mettant l’accent expressément sur la nécessité d’ajouter des places à sécurité maximale et d’évaluer la viabilité à long terme du Centre correctionnel de Baffin.

Les résultats de cette évaluation seront disponibles en avril 2015 et permettront au Ministère de prendre des décisions stratégiques éclairées concernant les essais et les concepts possibles pour l’exercice 2015-2016 en fonction des besoins actuels et à long terme des services correctionnels du Nunavut, notamment l’incarcération dans des conditions appropriées des Nunavummiuts sur le territoire ou dans les établissements des provinces ou d’autres territoires, au besoin.

L’objectif ultime est d’ajouter des places à sécurité maximale.

49. La surveillance — Pour assurer un environnement sécuritaire, les Services correctionnels ont établi des procédures de surveillance des détenus, notamment pour leur placement en isolement. Nous avons choisi au hasard cinq jours dans chacun des exercices 2012-2013 et 2013-2014 pour examiner les journaux de surveillance de la population carcérale générale et du quartier d’isolement du Centre correctionnel de Baffin. Nous avons constaté que les agents correctionnels avaient procédé au dénombrement requis des détenus.

50. Le placement en isolement — Neuf des vingt-et-un détenus du Centre correctionnel de Baffin dont nous avons examiné les dossiers avaient été placés en isolement au moins une fois. Dans le cas de ces neuf détenus, nous avons constaté que le Ministère n’avait pas surveillé de manière adéquate si les principales règles régissant le placement en isolement avaient été respectées (voir la pièce 3). Par exemple, lorsqu’un détenu est placé en isolement pendant plus d’une semaine, un examen hebdomadaire doit être effectué en vue de déterminer s’il est approprié de poursuivre l’isolement. Rien dans les dossiers de notre échantillon n’indique que des examens hebdomadaires ont été réalisés. Pourtant, sept des détenus de notre échantillon sont restés en isolement pendant dix jours ou plus.

Pièce 3 — La direction du Centre correctionnel de Baffin n’a pas systématiquement respecté les principales règles régissant le placement des détenus en isolement 1 

Principales règles régissant le placement en isolement Respect des règles (oui ou non)
Isolement préventif 2  Isolement disciplinaire 3 
Motifs à l’appui du placement en isolement Non
(motifs pour 10 placements sur 14)
Non
(motifs pour 5 placements sur 6)
Autorisation de l’administrateur ou du comité de discipline Non
(aucun des 14 placements n’a été autorisé par l’administrateur)
Non
(5 des 6 placements ont été autorisés par le comité de discipline)
Examen hebdomadaire du placement en isolement (pour les détenus placés en isolement pendant plus d’une semaine) Non
(aucun des 6 placements n’a été examiné)
Non
(le seul placement concerné n’a pas fait l’objet d’un examen)

 1  Nous avons examiné 20 placements en isolement visant 9 détenus.

 2  Isolement préventif : Mesure temporaire visant à isoler un détenu du reste de la population carcérale. Cet isolement n’est pas le résultat d’une décision du comité de discipline, mais plutôt une décision administrative prise pour des raisons de sécurité. Un détenu peut lui-même demander à être placé en isolement préventif. Seul l’administrateur de l’établissement peut décider de placer un détenu en isolement préventif.

 3  Isolement disciplinaire : Sanction qui est imposée lorsqu’une personne incarcérée a commis un manquement au code de conduite. La mise en isolement disciplinaire est ordonnée par le comité de discipline pour une période pouvant aller jusqu’à 15 jours.

51. Selon les directives sur les services correctionnels, les détenus ne devraient pas être maintenus en isolement disciplinaire pendant plus de 15 jours. Nous avons constaté qu’aucun placement en isolement au sein de notre échantillon n’avait dépassé 15 jours.

52. De longues périodes d’isolement ne sont pas sans risque pour la santé physique et mentale des détenus. Il importe donc de surveiller si les principales règles qui régissent le placement en isolement sont respectées. Dans le cas contraire, la direction de l’établissement n’a pas l’assurance que les détenus sont pris en charge de manière sécuritaire et conformément aux directives sur les services correctionnels et les ordres permanents en vigueur. Nous avons constaté que pour trois des six détenus de notre échantillon placés en isolement préventif pendant plus d’une semaine, aucune des trois principales règles n’avait été respectée (motifs, autorisation et examen hebdomadaire). Notre recommandation à ce sujet est présentée au paragraphe 58.

53. La contrebande d’objets interdits — La lutte contre la contrebande d’objets interdits est essentielle pour assurer la sécurité des détenus et du personnel. Au cours des exercices 2012-2013 et 2013-2014, 203 incidents liés à des objets interdits ont été recensés au Centre correctionnel de Baffin – à raison de 8 incidents par mois en moyenne. Les incidents étaient de gravité diverse et concernaient divers types d’objets interdits. La présence d’objets interdits dans un centre correctionnel peut entraîner des incidents de sécurité, comme des incendies. Le 12 novembre 2012, des détenus ont allumé deux incendies au Centre correctionnel de Baffin.

54. Le mauvais état du Centre correctionnel de Baffin a augmenté le risque d’introduction d’objets interdits dans l’établissement. Nous avons constaté que des représentants des Services correctionnels et des organismes externes, comme des experts-conseils et le Bureau de l’enquêteur correctionnel, avaient porté divers problèmes de sécurité à l’attention du Ministère. Ils ont notamment souligné la nécessité de boucher les trous dans les murs du Centre, d’améliorer le système de caméras de sécurité et d’ériger une clôture supplémentaire autour de la cour extérieure du Centre. Cependant, la seule mesure prise par le Ministère à ce jour a été de boucher les trous à l’intérieur du Centre avec du contreplaqué, un matériel qui pose des risques d’incendie. Les autres problèmes signalés n’ont toujours pas été réglés.

55. Nous avons constaté que le Ministère n’avait pas surveillé comme il se doit si la direction du Centre correctionnel de Baffin luttait contre la contrebande d’objets interdits. Selon les procédures opérationnelles établies par le Centre, le personnel correctionnel doit fouiller les cellules et les aires communes durant chaque quart de travail. La direction du Centre nous a indiqué que les fouilles étaient plutôt réalisées de manière sporadique, et que le but était de fouiller les cellules et les aires communes une fois par mois. Par ailleurs, les fouilles n’ont pas été documentées, contrairement à ce qui est prévu par les procédures opérationnelles du Centre. Des représentants du Centre nous ont expliqué que le Centre ne disposait pas du personnel supplémentaire nécessaire pour effectuer les fouilles requises.

56. Pour réduire le nombre d’objets interdits introduits dans le Centre, nous avons constaté que la salle de visite avait été relocalisée et réaménagée afin de limiter les contacts personnels pendant les visites. La politique relative aux visites a également été révisée. Nous avons noté que le nombre d’incidents liés à des objets interdits avait initialement diminué à la suite du réaménagement et de la relocalisation de la salle de visite, mais qu’il avait de nouveau augmenté au bout de quelques mois.

57. Même si le Ministère disposait de renseignements sur le nombre d’incidents liés à la contrebande signalés, il n’a pas analysé les tendances, notamment les types d’objets interdits introduits, la gravité des incidents et les modes d’entrée des objets interdits dans le Centre. Sans ces renseignements, le Ministère ne disposait pas de toute l’information voulue pour régler les problèmes de contrebande du Centre et il ne connaissait pas non plus pleinement l’incidence de la contrebande sur les établissements et les détenus. Par exemple, la contrebande de certains objets interdits, comme les drogues, peut nuire aux efforts déployés par le Ministère pour aider les détenus à vaincre leurs dépendances.

58. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait surveiller la direction des établissements pour assurer le respect des politiques, des directives et des procédures opérationnelles visant le placement en isolement des détenus et les fouilles des cellules et des aires communes.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice procédera à un examen de la dotation, sur le plan fonctionnel et sur le plan organisationnel, au sein des Services correctionnels avant juin 2015 afin de recenser les lacunes en matière de services et de capacité.

Le Ministère créera au sein des Services correctionnels une fonction qui sera axée sur le suivi et la conformité, sous réserve des résultats de l’examen de la dotation et de l’approbation du budget nécessaire. De telles fonctions existent déjà dans la majorité des services correctionnels du Canada. Cette fonction contribuera à assurer la conformité aux politiques et procédures et fera des suivis et mènera des enquêtes au besoin.

Le Ministère s’emploie actuellement à réécrire la Loi sur les services correctionnels et son règlement afin de les actualiser et d’établir un texte fondateur. L’examen des politiques, des directives et des procédures opérationnelles en vigueur commencera au début de 2015 et coïncidera avec l’examen de la Loi sur les services correctionnels.

59. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait analyser les tendances en matière de contrebande d’objets interdits, notamment les types d’objets dont il est question et leur mode d’entrée dans l’établissement.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice consigne les incidents liés à des objets interdits dans le Système de gestion des délinquants (SGD) informatisé depuis 2000. Les tests sur une version actualisée du SGD devaient débuter avant la fin de janvier 2015. Cette nouvelle version permettra au Ministère de repérer les données sur la contrebande et de les extraire en vue de faire une analyse des tendances. Dès que la mise en œuvre de la nouvelle version dans l’environnement d’essai sera réussie, une version permanente sera instaurée. Une fois que le Ministère disposera de cette nouvelle version, il pourra analyser les tendances en matière de contrebande.

60. Les examens de sécurité et les plans d’urgence — Nous avons constaté que la direction de l’établissement n’avait pas respecté les règles de sécurité de base. Elle n’avait pas élaboré les plans de sécurité requis pour le Centre correctionnel de Baffin, ni réalisé les examens officiels de la sécurité requis. Ces plans et ces examens ont pour objectif d’améliorer la sécurité au sein du Centre. Des représentants du Ministère nous ont informés que des examens non officiels du Centre étaient réalisés de façon quotidienne et hebdomadaire et que des enquêtes étaient menées sur les incidents, ce qui permettait de gérer les risques liés au fait de ne pas réaliser les examens officiels de la sécurité requis. Les examens non officiels menés ne satisfont toutefois pas aux exigences contenues dans les directives sur les services correctionnels. Nous avons constaté que des plans d’urgence avaient été établis.

61. Les lacunes relevées en matière de sécurité — Aux termes des directives sur les services correctionnels, il incombe à la direction des centres correctionnels de s’assurer que les autorités compétentes réalisent annuellement des inspections de prévention des incendies et des inspections sanitaires, et que les lacunes relevées font l’objet d’un suivi et sont corrigées. Nous avons constaté que certaines des lacunes graves qui avaient été signalées dans des rapports d’inspection de prévention des incendies n’avaient pas été corrigées au Centre correctionnel de Baffin. Par exemple, il n’y avait pas d’éclairage de secours dans le gymnase, où sont régulièrement logés des détenus en raison de la surpopulation carcérale.

62. Certaines des lacunes recensées au Centre correctionnel de Baffin ont été signalées à maintes reprises dans le cadre d’inspections. Six lacunes non corrigées ont été signalées pour la première fois il y a plus de deux ans. Il s’agit entre autres de trous dans les murs et de l’utilisation d’un matériel combustible (contreplaqué) pour recouvrir les murs et les plafonds.

63. Deux sociétés externes ont procédé à des évaluations du Centre correctionnel de Baffin en 2010 et en 2012. Des lacunes ont été relevées, comme l’absence de séparations coupe-feu adéquates entre les diverses unités du Centre et des systèmes de sécurité peu fiables. (Parmi les problèmes signalés, il faut mentionner l’installation électrique des systèmes, les mécanismes de verrouillage des portes et les panneaux de contrôle.)

64. Nous avons constaté que la plupart des lacunes graves signalées n’avaient toujours pas été corrigées, y compris l’absence de séparations coupe-feu adéquates et les systèmes de sécurité peu fiables. Nous avons aussi constaté qu’aucun budget n’avait été approuvé pour permettre au ministère de la Justice de rénover le Centre correctionnel de Baffin (voir le paragraphe 33).

65. Au moment de notre audit, le Centre correctionnel de Baffin était surpeuplé. Il recevait un plus grand nombre de détenus que prévu, et des détenus qui ont une cote de sécurité pour laquelle le Centre n’a pas été conçu. Ces facteurs ont contribué à la détérioration du Centre et ont augmenté le niveau de stress du personnel et des détenus.

66. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait, en collaboration avec le ministère des Services communautaires et gouvernementaux, prendre des mesures correctives pour régler tous les cas de non-conformité relevés au Centre correctionnel de Baffin dans les rapports d’inspection de prévention des incendies et les rapports externes.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice collabore actuellement avec le ministère des Services communautaires et gouvernementaux en vue de corriger tous les cas de non-conformité relevés dans les rapports d’inspection de prévention des incendies et les rapports externes, particulièrement au Centre correctionnel de Baffin. Il continuera de collaborer avec le ministère des Services communautaires et gouvernementaux en vue de respecter l’obligation de procéder à des inspections régulières et d’établir des plans d’entretien. Des fonds ont déjà été débloqués et des plans établis pour évaluer la viabilité et les besoins en fonction de la capacité des infrastructures actuelles du territoire, notamment les lacunes existantes. Les résultats de cette évaluation seront disponibles en avril 2015 et nous permettront de déterminer les solutions les plus efficaces et efficientes pour corriger les manques à combler et les lacunes actuelles.

67. Les exercices d’évacuation d’urgence — Nous avons constaté que la direction du Centre correctionnel de Baffin n’avait pas mené les exercices trimestriels d’évacuation d’urgence requis pour les exercices 2012-2013 et 2013-2014. De plus, des représentants du Ministère nous ont indiqué qu’il n’y avait eu aucun exercice d’évacuation d’urgence entre octobre 2007 et janvier 2011. Nous avons appris que les exercices ont été interrompus en raison des risques pour la sécurité que posait la surpopulation au sein du Centre. Il faut cependant savoir que des exercices d’évacuation d’urgence menés à intervalles réguliers sont essentiels pour assurer la sécurité des détenus et du personnel. Le Centre a été le théâtre de trois incendies depuis 2005.

68. Compte tenu de la gravité de nos constatations dans ce secteur, nous avons envoyé une lettre au sous-ministre de la Justice par intérim en septembre 2014. Nous voulions ainsi lui faire connaître nos préoccupations au sujet des exercices d’évacuation d’urgence, qui requièrent son attention immédiate. Nous voulions aussi donner au Ministère l’occasion de prendre immédiatement les mesures nécessaires pour s’acquitter de ses obligations. Le Ministère a reconnu, dans sa réponse, la gravité de la situation et a défini les mesures qu’il compte prendre pour corriger les lacunes relevées.

69. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait s’assurer que la direction du Centre correctionnel de Baffin mène les exercices d’évacuation d’urgence requis. Il devrait documenter les exercices et prendre les mesures nécessaires pour corriger les lacunes, au besoin.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Depuis qu’il a été avisé de la situation par le Bureau du vérificateur général, le ministère de la Justice a pris des mesures pour s’assurer que des exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie sont menés au Centre correctionnel de Baffin et qu’ils continueront à être menés régulièrement dans tous les établissements. En novembre 2014, un système électronique de suivi et de planification a été instauré. Il permet d’envoyer des préavis à chaque établissement sur les exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie à mener. Un suivi des progrès est réalisé afin de s’assurer que les exercices d’évacuation sont réalisés et documentés selon les délais prescrits.

Une note de service a été envoyée aux administrateurs et aux gestionnaires en janvier 2015 pour préciser les exigences applicables et souligner l’importance de mener les exercices d’évacuation obligatoires. Tous les établissements correctionnels du Nunavut sont équipés de copies d’un calendrier standard d’évacuation. Les lacunes relevées dans les rapports sur les exercices réalisés seront corrigées.

En 2015, le Ministère compte créer une fonction qui sera chargée de faire le suivi de la conformité afin d’avoir une assurance supplémentaire grâce à des moyens de surveillance renforcée dans ce secteur.

Le Centre de guérison de Rankin Inlet n’était pas entièrement prêt lors de son ouverture et présente des problèmes qui menacent la sécurité des détenus et du personnel

70. Nous avons constaté que le Centre de guérison de Rankin Inlet n’était pas entièrement prêt à réaliser les évaluations des détenus au moment de son ouverture. Par ailleurs, la direction de l’établissement n’avait pas défini sa vision, ni les procédures opérationnelles pour un centre dit de guérison. Entre-temps, le Centre a adopté les procédures opérationnelles du Centre correctionnel de Baffin, qui n’est pas considéré comme un centre de guérison. De plus, nous avons constaté que la sécurité des détenus et du personnel du Centre de guérison de Rankin Inlet était compromise :

71. Notre analyse à l’appui de cette constatation rend compte de ce que nous avons examiné et aborde les procédures d’admission des détenus, les procédures opérationnelles du Centre, les niveaux de sécurité et les prévenus en détention provisoire, le placement en isolement et d’autres règles de sécurité.

72. Cette constatation est importante parce que le Centre de guérison de Rankin Inlet devait permettre de combler certains des besoins du système correctionnel du Nunavut. Or, étant donné qu’il n’était pas entièrement prêt lors de son ouverture, le Centre n’a permis d’atteindre cet objectif qu’en partie seulement.

73. De plus, cette constatation est importante parce que le ministère de la Justice est tenu, aux termes de la Loi sur les services correctionnels, d’assurer l’incarcération des détenus dans des conditions de sécurité satisfaisantes dans les établissements correctionnels. Il lui incombe aussi d’assurer l’incarcération des détenus selon des règles de sécurité particulières et d’assurer la sécurité des détenus et du personnel correctionnel. Étant donné la nature même des établissements correctionnels, les détenus sont vulnérables et comptent sur le Ministère pour assurer le respect des politiques et des procédures visant à protéger leur sécurité, surtout pendant les situations d’urgence.

74. Nos recommandations relativement aux secteurs examinés sont présentées aux paragraphes 79, 82, 85 et 87.

75. Ce que nous avons examiné — Nous avons examiné si le Ministère s’était assuré que le Centre de guérison de Rankin Inlet répondait aux besoins pour lesquels il avait été construit. Pour ce faire, nous avons examiné les mêmes règles de sécurité analysées aux paragraphes 38 et 39, mais pour le Centre de guérison.

76. Les procédures d’admission des détenus — Le Centre de guérison de Rankin Inlet a ouvert ses portes en janvier 2013. Il peut accueillir 48 détenus de sexe masculin présentant une cote de sécurité minimale ou moyenne. Nous avons constaté que le Centre avait été sous-utilisé depuis son ouverture. Par exemple, selon les données du Ministère, 19 détenus y étaient incarcérés en juillet 2013 et 34 détenus à la mi-janvier 2014. L’ouverture du Centre n’a pas eu d’effet marqué sur la surpopulation du Centre correctionnel de Baffin. En effet, un an après l’ouverture du Centre de guérison, le Centre correctionnel de Baffin est en surcapacité (118 %) avec 80 détenus pour 68 places officielles.

77. Nous avons constaté que le Ministère avait eu des difficultés à pourvoir certains postes au Centre de guérison lors de son ouverture, notamment en raison de la pénurie de logements pour le personnel. Nous avons été informés que le Centre n’avait pas pu accueillir rapidement les détenus, en partie parce qu’il ne disposait pas d’un effectif complet d’employés compétents au moment de l’ouverture.

78. Nous avons constaté que le Centre ne disposait toujours pas d’un effectif complet d’employés qualifiés. Il n’y avait pas d’employés formés pour procéder à l’évaluation des détenus, et le personnel devait suivre davantage de formation sur la gestion de cas auprès des détenus. Faute d’employés qualifiés au Centre de guérison, les détenus ont été évalués par le personnel du Centre correctionnel de Baffin, qui a ensuite recommandé leur incarcération au Centre de guérison de Rankin Inlet. La direction de l’établissement nous a indiqué que le Centre de guérison peut refuser le transfèrement de détenus du Centre correctionnel de Baffin, ce qui a déjà été fait par le passé. Le Centre de guérison n’acceptait en effet pas les détenus qui étaient difficiles à gérer ou qui avaient des besoins lourds. En cas de refus, les détenus restaient au Centre correctionnel de Baffin. C’est ce qui explique notamment pourquoi le Centre de guérison n’a contribué que de façon limitée à réduire la surpopulation carcérale au Centre correctionnel de Baffin.

79. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait examiner comment le Centre de guérison de Rankin Inlet pourrait mieux combler les besoins du système correctionnel du territoire en matière de capacité et s’assurer que le personnel du Centre est mieux formé.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Pour mieux répondre à la demande de places dans les centres correctionnels et combler les besoins en matière de services correctionnels de la région de Kivalliq, le Centre de guérison de Rankin Inlet accepte désormais directement certains détenus de Rankin Inlet et des collectivités avoisinantes.

Les admissions directes au Centre de guérison de Rankin Inlet seront possibles pour les prévenus qui auront fait l’objet d’une évaluation récente du classement ou pour ceux qui seront gardés en transit en attendant leur transfèrement au Centre correctionnel de Baffin pour leur évaluation initiale.

Une conférence de la haute direction aura lieu au début de 2015. Pendant cette conférence, le Ministère définira la vision et la mission du Centre de guérison de Rankin Inlet. Des discussions auront alors lieu pour déterminer les mesures qui pourraient être prises pour s’assurer que cet établissement soit pleinement exploité, notamment la possibilité de doter le Centre de moyens supplémentaires pour procéder à l’évaluation du classement des détenus.

En décembre 2014, un comité de gestion de cas a été chargé d’identifier les besoins en formation et d’élaborer un manuel de formation. La mise en œuvre d’une nouvelle version du Système de gestion des délinquants informatisé au sein du Ministère permettra d’avoir davantage de moyens pour surveiller et extraire les données relatives à la formation des membres du personnel. Dès que ce système sera élaboré, il sera utilisé pour surveiller la formation suivie par tous les membres du personnel et s’assurer que le personnel reçoit la formation obligatoire.

80. Les procédures opérationnelles du Centre — L’établissement de procédures opérationnelles est une tâche essentielle lors de la mise sur pied d’un centre correctionnel. Selon les données du Ministère, le Centre de guérison de Rankin Inlet a été construit au coût approximatif de 37 millions de dollars, afin de servir de centre de guérison. Nous avons cependant constaté que la direction du Centre ne connaissait pas l’énoncé de vision établi par le Ministère pour le Centre et qu’elle n’avait pas défini elle-même d’énoncé de vision.

81. Nous avons aussi constaté que le Centre de guérison de Rankin Inlet ne disposait pas de ses propres ordres permanents lors de son ouverture. Il a plutôt fonctionné en utilisant les ordres permanents du Centre correctionnel de Baffin, qu’il a d’ailleurs fini par adopter. Par conséquent, le Centre de guérison a suivi les mêmes procédures que le Centre correctionnel de Baffin, ce qui pourrait limiter les possibilités de mettre en œuvre de nouvelles approches et de nouveaux cours de formation adaptés à un centre de guérison.

82. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait s’assurer que le Centre de guérison de Rankin Inlet dispose d’une vision documentée pour mener ses activités et que cette vision guide l’exploitation du Centre.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le Ministère de la Justice a prévu de tenir une conférence de la haute direction au début de 2015. Pendant cette conférence, le Ministère définira la vision et la mission du Centre de guérison de Rankin Inlet. Au fur et à mesure que nous avancerons, ces énoncés seront revus pour s’assurer qu’ils correspondent toujours aux besoins du territoire.

83. Les niveaux de sécurité et les prévenus en détention provisoire — Comme nous l’avons indiqué au paragraphe 78, le Centre de guérison de Rankin Inlet n’acceptait pas les détenus difficiles. Selon l’information que nous avons recueillie, aucun détenu soumis à un niveau de sécurité maximale n’a été accepté, sauf pour ce qui est des personnes en détention provisoire. Nous avons appris que, désormais, le Centre acceptait directement les prévenus en détention provisoire, au lieu que ces détenus lui soient transférés d’autres centres correctionnels. Selon les directives sur les services correctionnels, les prévenus en détention provisoire devraient être classés dans la catégorie des détenus présentant une cote de sécurité maximale dès leur admission en détention. Nous avons aussi constaté que, comme pour le Centre correctionnel de Baffin, le Ministère n’avait pas demandé qu’un formulaire de renonciation soit obligatoirement signé par les prévenus en détention provisoire avant leur incarcération avec des détenus condamnés.

84. Le placement en isolement — Selon notre examen de 12 dossiers du Centre, 3 détenus avaient été placés en isolement préventif ou en isolement disciplinaire au moins une fois. Nous avons constaté que la direction du Centre n’avait pas toujours suivi les procédures relatives au placement et à la surveillance des détenus en isolement. Lors de l’examen de notre échantillon, nous avons constaté ce qui suit :

Par conséquent, la direction n’a pas eu l’assurance que les détenus étaient pris en charge de manière sécuritaire et dans le respect de leurs droits, conformément aux directives applicables.

85. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait surveiller la direction du Centre de guérison de Rankin Inlet pour assurer le respect des politiques, des directives et des procédures opérationnelles régissant le placement en isolement des détenus.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. D’ici la fin mars 2015, une note de service précisant les pratiques exemplaires en matière de placement en isolement et contenant la politique pertinente à cet égard sera envoyée à tous les établissements correctionnels.

La révision de toutes les directives et politiques correctionnelles commencera au début de 2015.

Afin d’assurer le respect de ces importantes politiques, le ministère de la Justice s’efforcera de créer une fonction axée sur la conformité. Cette fonction contribuera au suivi de la conformité aux politiques de gestion des établissements correctionnels, surtout en ce qui a trait au placement en isolement.

86. Autres règles de sécurité — Nous avons constaté que toutes les lacunes relevées lors des inspections de prévention des incendies et des inspections sanitaires réalisées au Centre de guérison de Rankin Inlet au cours de l’exercice 2013-2014 avaient été corrigées. Nous avons cependant constaté que certaines règles de sécurité de base n’avaient pas été respectées au sein de l’établissement (voir la pièce 4). Ainsi, aucun exercice d’évacuation d’urgence trimestriel n’a été mené au cours de l’exercice 2013-2014. Cette constatation est importante parce que les détenus incarcérés dans les centres correctionnels sont vulnérables, et ils comptent sur le Ministère pour assurer le respect des politiques et procédures visant à protéger leur sécurité, surtout pendant les situations d’urgence. Comme nous l’avons indiqué au paragraphe 68, nous avons fait parvenir une lettre au sous-ministre de la Justice par intérim en septembre 2014, afin de lui communiquer des préoccupations au sujet des exercices d’évacuation d’urgence qui requièrent son attention immédiate. Le Ministère a reconnu, dans sa réponse, la gravité de la situation et a défini les mesures qu’il compte prendre pour corriger les lacunes relevées.

Pièce 4 — Certaines règles de sécurité de base n’ont pas été respectées au Centre de guérison de Rankin Inlet

Règles de sécurité de base Règles respectées au cours de l’exercice 2013-2014
Réalisation d’un examen de sécurité Non
Établissement d’un plan de sécurité Non
Établissement de plans d’urgence pour les principales situations d’urgence Non
(aucun plan d’évacuation)
Réalisation des exercices trimestriels d’évacuation d’urgence Non (0/4)

87. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait s’assurer que la direction du Centre de guérison de Rankin Inlet mène les exercices d’évacuation d’urgence requis. Il devrait documenter les exercices et prendre les mesures nécessaires pour corriger les lacunes, au besoin.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Depuis que le ministère de la Justice a été avisé de la situation par le Bureau du vérificateur général, des exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie seront menés tous les trimestres au Centre de guérison de Rankin Inlet.

Le Ministère a pris des mesures pour s’assurer que ces exercices continueront d’être menés tous les trimestres. Un système électronique de suivi et de planification a été instauré. Il permet d’envoyer des préavis à chaque établissement sur les exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie à mener. Un suivi des progrès est réalisé afin de s’assurer que les exercices d’évacuation sont réalisés et documentés selon les délais prescrits.

Une note de service, accompagnée d’une copie des politiques pertinentes, a été envoyée en décembre 2014 à l’ensemble des établissements pour préciser les exigences applicables et souligner l’importance de mener les exercices d’évaluation obligatoires. Tous les établissements correctionnels du Nunavut seront équipés de copies d’un calendrier standard d’évacuation.

En 2015, le Ministère compte créer une fonction qui sera chargée de faire le suivi de la conformité, afin d’avoir une assurance supplémentaire grâce à des moyens de surveillance renforcée dans ce secteur.

Le Ministère ne gère pas adéquatement la dotation en personnel du Centre correctionnel de Baffin et du Centre de guérison de Rankin Inlet

88. Nous avons constaté que le ministère de la Justice n’avait pas géré adéquatement la dotation en personnel du Centre correctionnel de Baffin et du Centre de guérison de Rankin Inlet :

89. Notre analyse à l’appui de cette constatation rend compte de ce que nous avons examiné et aborde la dotation en personnel, le recours aux heures supplémentaires et la formation.

90. Cette constatation est importante parce que les méthodes de dotation ont limité la capacité du Ministère à remplir ses obligations aux termes de la Loi sur les services correctionnels. Le Ministère réaffectait des fonds qui devaient être consacrés à certaines de ses responsabilités, comme la prestation de programmes, pour pouvoir couvrir les coûts liés aux employés occasionnels et aux heures supplémentaires qu’il doit engager pour corriger les lacunes en matière de dotation.

91. Nos recommandations relativement au secteur examiné sont présentées aux paragraphes 100 et 102.

92. Ce que nous avons examiné — Nous avons vérifié si le Ministère avait déterminé le nombre et le type d’employés requis au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet, et s’il avait pris des mesures pour corriger les manques à combler recensés en matière de dotation, le cas échéant. Nous avons aussi vérifié si le Ministère avait évalué le recours aux heures supplémentaires et pris des mesures pour lutter contre le recours abusif aux heures supplémentaires. Nous avons finalement vérifié si le Ministère avait effectué un suivi pour déterminer si le personnel correctionnel avait reçu la formation requise.

93. La dotation en personnel — Nous avons constaté que le ministère de la Justice n’avait pas procédé à une analyse approfondie, portant sur les besoins en personnel à la fois pour la prestation de programmes et la sécurité, pour le Centre correctionnel de Baffin et le Centre de guérison de Rankin Inlet. Le Ministère a déterminé le nombre et le type d’employés requis dans les deux centres en fonction de l’expérience opérationnelle.

94. Avant l’ouverture du Centre de guérison de Rankin Inlet en janvier 2013, le Ministère avait mené une campagne de recrutement en vue de pourvoir divers postes au sein de cet établissement. Des représentants du Ministère nous ont cependant indiqué que plusieurs de ces postes sont depuis devenus vacants. Afin de pourvoir ces postes et les postes vacants au Centre correctionnel de Baffin, le Ministère a recours à des employés occasionnels ou aux heures supplémentaires. Cette solution à court terme est cependant coûteuse à long terme. En effet, il faut payer les heures supplémentaires effectuées par les employés, et le recours aux employés occasionnels peut alourdir les coûts de formation et les frais administratifs. Le Ministère a indiqué que les sommes consacrées aux heures supplémentaires et aux employés occasionnels réduisaient les fonds disponibles pour la prestation de programmes.

95. En 2013, le Ministère a préparé un dossier de décision décrivant la nécessité de créer 42 postes supplémentaires au sein des Services correctionnels et de ses établissements. Comme nous l’avons déjà indiqué, ce dossier ne reposait pas sur une analyse approfondie. Le dossier de décision décrivait les difficultés que devait surmonter le Ministère, notamment le surpeuplement du Centre correctionnel de Baffin et les pénuries de personnel, qui contribuaient à l’alourdissement des coûts liés au personnel occasionnel et aux heures supplémentaires. Le dossier prévoyait entre autres la création de 29 postes au Centre Makigiarvik, dont 24 agents chargés de cas, une infirmière psychiatrique, un agent de classification, un intervenant de programmes correctionnels et deux chefs cuisiniers. Il y était aussi question de créer des postes d’employés administratifs et d’employés de première ligne dans d’autres établissements, notamment un agent des enquêtes et des normes au sein des Services correctionnels du Ministère. Le titulaire de ce poste serait chargé de faire respecter les normes correctionnelles dans tous les établissements. Nous avons constaté que le Conseil de gestion financière avait approuvé la création de 26 des 42 postes proposés par les Services correctionnels : 24 agents chargés de cas et deux cuisiniers pour le Centre Makigiarvik.

96. Le Ministère a aussi demandé une enveloppe de 2,8 millions de dollars pour couvrir le déficit de son budget des salaires en raison du recours aux heures supplémentaires et aux employés occasionnels au cours de l’exercice 2013-2014. L’enveloppe a été approuvée par le Conseil de gestion financière. À ce moment-là, le Ministère a reçu l’ordre de procéder à un examen des politiques et procédures visant les opérations et la dotation en personnel de ses établissements correctionnels. Cet examen n’a toujours pas été fait. Tant que ses établissements correctionnels ne disposeront pas d’un nombre suffisant d’employés permanents à temps plein, le Ministère continuera de solliciter des rallonges budgétaires pour régler les coûts liés au personnel occasionnel et aux heures supplémentaires. Toutefois, le financement du recours à des employés occasionnels et à des heures supplémentaires ne permet pas de s’attaquer à la cause du problème, à savoir la pénurie d’employés permanents à temps plein. Notre recommandation à ce sujet est présentée au paragraphe 100.

97. Le recours aux heures supplémentaires — Le Ministère a engagé des dépenses importantes en raison de son recours aux heures supplémentaires. Au cours de l’exercice 2013-2014, les dépenses liées aux heures supplémentaires ont représenté 13 % du budget de fonctionnement du Centre correctionnel de Baffin et 8 % du budget de fonctionnement du Centre de guérison de Rankin Inlet. Le Ministère connaissait les raisons pour lesquelles ces établissements ont autant eu recours aux heures supplémentaires. Les dispositions de la convention collective en vigueur, le manque d’employés permanents à temps plein, la nécessité de disposer du personnel requis pour exploiter un centre correctionnel 24 heures sur 24 sont en effet tous des facteurs qui expliquent la difficulté qu’éprouve le Ministère à contrôler le recours aux heures supplémentaires.

98. Malgré tout, certains facteurs étaient sous le contrôle du Ministère, par exemple mieux planifier les horaires pour tenir compte de la formation et des congés. Nous avons constaté que le Ministère n’avait pas surveillé ou géré correctement le recours aux heures supplémentaires dans ses établissements. Il a peu fait pour trouver des façons de gérer le recours aux heures supplémentaires et de réduire les dépenses connexes. Il n’a pas non plus analysé ses données à ce sujet, ni fixé de seuils acceptables d’heures supplémentaires au sein de ses établissements correctionnels.

99. Nous avons analysé le recours aux heures supplémentaires au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet pour les exercices 2012-2013 et 2013-2014. Nous avons constaté que les Services correctionnels avaient consacré 1,1 million de dollars en 2012-2013 et 2 millions de dollars en 2013-2014 au paiement des heures supplémentaires effectuées dans ces deux centres seulement. Le recours aux heures supplémentaires au sein de ces deux établissements a fait augmenter les revenus du personnel de 20 % en moyenne pour l’exercice 2013-2014. Le recours aux heures supplémentaires a été particulièrement important au Centre correctionnel de Baffin, où les revenus de 16 employés de première ligne ont ainsi augmenté de 50 % pour l’exercice 2013-2014. Les revenus de 5 de ces 16 employés ont augmenté de plus de 90 % (soit presque doublé), en raison des heures supplémentaires effectuées.

100. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait :

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Les Services correctionnels collaboreront avec le ministère des Finances pour mener une analyse approfondie de la dotation en personnel, notamment des besoins de chaque établissement. Cette évaluation sera amorcée avant juin 2015.

Le Ministère a lancé, en novembre 2014, une vaste campagne de recrutement multimédia pour les Services correctionnels, qui met l’accent sur le recrutement de bénéficiaires et l’éducation du public. Vers la fin de 2014, le Ministère a aussi mené des initiatives de communication avec les communautés à Pangnirtung, à Cape Dorset, à Pond Inlet, à Qikiqtarjuaq et à Clyde River. Ces initiatives de communication ont connu un franc succès et le Ministère élargira ses initiatives de recrutement dans les communautés à d’autres localités à l’avenir.

Il est prévu que l’examen de la dotation de juin 2015 contienne un volet qui sera consacré à l’examen du recours aux heures supplémentaires dans les établissements correctionnels du Nunavut. Créer de nouveaux postes permanents à temps plein au sein des établissements devrait favoriser la réduction de la majeure partie des dépenses actuelles au titre des heures supplémentaires.

101. La formation — Nous avons constaté que le ministère de la Justice avait commencé à faire le suivi des cours de formation obligatoire suivis par les membres du personnel, mais que ses données étaient incomplètes. Même sans données complètes, les représentants du Ministère savaient qu’un bon nombre des membres du personnel n’avaient pas reçu la formation obligatoire. Cela signifie que des employés ont travaillé dans des établissements correctionnels même s’ils n’avaient pas suivi de cours de premiers soins ou de formation sur les troubles de santé mentale, le système de justice pénale ou le recours approprié à la force. Nous avons été informés que cette situation s’expliquait surtout par le fait que le Ministère s’était doté d’un nouveau programme de formation et qu’il jugeait que la formation suivie antérieurement par le personnel était désuète. Selon des représentants du Ministère, environ la moitié des membres du personnel correctionnel ont suivi la formation requise à ce jour, et il faudra encore deux années avant de former tout le personnel.

102. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait élaborer et utiliser un système de suivi efficace pour s’assurer que les membres du personnel reçoivent la formation obligatoire.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Une version actualisée du Système de gestion des délinquants (SGD) informatisé du Ministère devrait commencer à être testée d’ici à la fin de janvier 2015. Cette nouvelle version du Système permettra au ministère de la Justice d’entrer, de faire le suivi et d’extraire des données relatives à la formation des membres du personnel. Dès que la mise en œuvre de la nouvelle version du Système dans l’environnement d’essai sera réussie, une version permanente sera instaurée. Le Système sera utilisé pour surveiller la formation suivie par tous les membres du personnel et pour s’assurer que l’ensemble du personnel reçoit la formation obligatoire.

La gestion de cas auprès des détenus

De graves lacunes dans la gestion des cas entravent les efforts du Ministère en matière de réadaptation des détenus

103. Dans l’ensemble, nous avons constaté que de graves lacunes dans la gestion des cas auprès des détenus entravaient les efforts déployés par le Ministère pour favoriser la réadaptation des détenus et les préparer à leur retour dans la collectivité. Il existe de sérieuses lacunes dans les modalités de gestion de cas auprès des détenus dans les deux plus grands centres de détention du territoire : le Centre correctionnel de Baffin et le Centre de guérison de Rankin Inlet. De plus, la manière dont les détenus sont incarcérés au Centre correctionnel de Baffin, en partie en raison de la surpopulation carcérale, limite la capacité du Ministère à gérer les dossiers des détenus de ce centre.

104. Dans tous les dossiers que nous avons examinés dans les deux établissements, nous avons constaté que les plans d’intervention pour encadrer la réadaptation des détenus étaient incomplets. Par conséquent, peu de détenus se sont vu recommander des programmes de réadaptation pour les aider à régler des problèmes comme la gestion de la colère ou la toxicomanie. De plus, il n’y avait aucun plan de préparation à la libération dans la collectivité pour favoriser la réinsertion sociale des détenus. Nous avons aussi constaté que les détenus des deux centres avaient eu un accès limité à des programmes de réadaptation. Pour les dossiers que nous avons examinés, la plupart des détenus considérés comme ayant besoin de services de santé mentale ne les avaient pas reçus. Toutefois, le Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik, qui est le plus petit établissement examiné dans le cadre de notre audit, s’est avéré exemplaire en matière de gestion de cas auprès des détenus dans tous ces secteurs.

105. Cette constatation est importante parce que le Ministère est chargé, aux termes de la loi, de faire appliquer les sanctions pénales prononcées et d’offrir des traitements aux détenus, et de protéger la population grâce à la mise en œuvre de programmes et de services adaptés dans les centres correctionnels. Le manque d’accès à ces programmes et services signifie que de nombreux détenus sont libérés sans avoir bénéficié de l’aide dont ils auraient eu besoin dans le cadre de leur réadaptation et de leur réinsertion sociale.

106. Notre analyse à l’appui de cette constatation rend compte de ce que nous avons examiné et aborde les évaluations des cas, les plans d’intervention pour les détenus, l’accès aux programmes de réadaptation, l’accès aux services de santé mentale, le suivi des progrès réalisés par les détenus et la planification en vue de la libération des détenus.

107. La gestion de cas prévoit la collecte de renseignements sur le détenu, l’évaluation de ses besoins et des risques qu’il pose, l’élaboration d’un plan d’intervention qui indique les changements comportementaux attendus, et le suivi périodique des progrès du détenu. Les programmes correctionnels sont conçus, élaborés et mis en œuvre pour répondre aux besoins des détenus, notamment les besoins culturels et spirituels des résidents inuits.

108. Le processus de gestion de cas dans les établissements du Nunavut est assorti d’exigences particulières visant :

109. La gestion du dossier d’un détenu doit débuter dès son incarcération. Une équipe de gestion de cas doit collaborer en vue d’établir, de planifier, de mettre en œuvre et d’évaluer en continu un plan d’intervention pour chaque détenu. Il est essentiel de respecter les directives sur les services correctionnels et la Loi sur les services correctionnels pour s’assurer que les détenus tirent le maximum des efforts de réadaptation et de réinsertion qui tiennent compte des risques qu’ils posent et de leurs besoins avant leur libération. Il est donc impératif que les exigences relatives à la gestion de cas soient respectées.

110. Les programmes correctionnels offerts aux détenus visent à réduire au minimum les effets négatifs de leur incarcération, à favoriser leur développement personnel ainsi qu’à les aider à réussir leur réinsertion sociale. Au Nunavut, les programmes doivent tenir compte des commentaires et avis des ressources communautaires et des aînés inuits.

111. Selon les données du ministère de la Justice, 98 % des détenus de sexe masculin incarcérés au Nunavut sont inuits. Au cours de l’exercice 2013-2014, l’âge moyen des détenus au moment de leur admission était de 32 ans. Le territoire a l’un des taux de criminalité les plus élevés du pays. En 2013, les crimes violents constituaient 26 % des infractions au Code criminel au Nunavut, contre 20 % pour l’ensemble du pays. Il faut aussi savoir que 19 % des crimes commis au Nunavut au cours de la même année entraient dans la catégorie des voies de fait. Le nombre d’agressions sexuelles était aussi 12 fois plus élevé que la moyenne nationale. Une grande proportion des crimes commis au Nunavut l’ont été sous l’effet de l’alcool. Or, il n’y a aucun centre de désintoxication au Nunavut à l’heure actuelle. Compte tenu de ces données alarmantes, il est particulièrement important que les détenus puissent avoir accès aux programmes et au soutien dont ils ont besoin au cours de leur incarcération.

112. Nous avons examiné les dossiers de 39 détenus. La plupart de ces détenus avaient été incarcérés pour des crimes violents et souffraient de problèmes de toxicomanie ou d’alcoolisme. Bon nombre de ces détenus avaient été condamnés pour avoir enfreint les conditions de leur probation ou d’une ordonnance du tribunal. Presque tous ces détenus étaient des récidivistes. Tous les détenus de notre échantillon étaient inuits.

113. Nos recommandations relativement au secteur examiné sont présentées aux paragraphes 119, 120, 124, 137, 138 et 142.

114. Ce que nous avons examiné — Nous avons vérifié si le Ministère avait appliqué les processus requis pour assurer la gestion de cas auprès des détenus pendant leur incarcération, notamment si les détenus avaient eu accès à des programmes et services adaptés à leurs besoins et aux risques qu’ils posaient. Nous avons examiné les méthodes de gestion de cas du Ministère au Centre correctionnel de Baffin, au Centre de guérison de Rankin Inlet et au Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik en étudiant les dossiers de 39 détenus ayant purgé une peine d’emprisonnement dans ces établissements entre le 1er avril 2012 et le 31 mars 2014 (voir la pièce 5).

Pièce 5 — Les résultats en matière de gestion de cas varient d’un établissement à l’autre (Centre correctionnel de Baffin, Centre de guérison de Rankin Inlet et Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik)

Exigences en matière de gestion de cas Résultats par établissement
Centre correctionnel de Baffin Centre de guérison de Rankin Inlet Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik
Procéder à une évaluation des cas 85 % (23 dossiers sur 27) 1  Sans objet
Élaborer un plan d’intervention 0 % (0 dossier sur 24) 2  100 % (6 dossiers sur 6)
Accès aux programmes de réadaptation 3  67 % (14 dossiers sur 21) 83 % (10 dossiers sur 12) 100 % (6 dossiers sur 6)
Accès aux services de santé mentale (pour les détenus en ayant besoin) 33 % (4 dossiers sur 12) 4  Sans objet 5  83 % (5 dossiers sur 6) 6 
Suivi du progrès des détenus 0 % (0 dossier sur 21) 25 % (3 dossiers sur 12) 100 % (6 dossiers sur 6)
Créer un plan en vue de la libération du détenu 5 % (1 dossier sur 21) 42 % (5 dossiers sur 12) 100 % (6 dossiers sur 6)

 1  Cinq détenus ont été transférés du Centre correctionnel du Slave Nord de Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest) au Centre de guérison de Rankin Inlet. Les évaluations d’un détenu réalisées lors d’une incarcération antérieure étaient encore valides.

 2  Cinq détenus ont été transférés du Centre correctionnel du Slave Nord de Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest) au Centre de guérison de Rankin Inlet. Trois détenus ont été transférés dans un établissement fédéral peu après leur condamnation. Un détenu a été remis en liberté sur ordre du tribunal au moment du prononcé de sa peine.

 3  Les résultats sont fondés sur le nombre de détenus qui ont suivi des programmes, selon les dossiers des établissements.

 4  Un suivi psychologique a été recommandé à 12 détenus.

 5  Aucun suivi psychologique n’a été recommandé dans ce centre.

 6  Six plans d’intervention prévoyaient du counselling.

115. Les évaluations des cas — Aux termes de la Loi sur les services correctionnels, les détenus doivent avoir accès à des programmes correctionnels visant à favoriser leur réadaptation. Procéder à une évaluation des besoins d’un détenu et des risques qu’il pose est donc essentiel pour s’assurer qu’il a accès aux programmes dont il a besoin. Nous avons constaté que la plupart des détenus avaient été envoyés au Centre correctionnel de Baffin pour y être évalués, car les membres du personnel du Centre de guérison de Rankin Inlet n’avaient pas été formés pour procéder aux évaluations.

116. Nous avons constaté que des évaluations avaient été réalisées pour la plupart des détenus de notre échantillon. Nous avons cependant constaté que ces évaluations n’avaient pas été réalisées en temps opportun. Cette situation signifie qu’il faut parfois beaucoup de temps avant que les membres du personnel déterminent les programmes ou services nécessaires pour favoriser la réadaptation d’un détenu. Pourtant, la rapidité des évaluations est particulièrement importante pour les détenus qui sont condamnés à de courtes peines.

117. Pour le Centre correctionnel de Baffin, la direction du Ministère et la direction de l’établissement ont élaboré des directives internes qui décrivent les outils d’évaluation à utiliser et les échéances connexes. Les directives internes du Centre prévoient que les détenus doivent être évalués dès le prononcé de leur peine. Nous avons cependant constaté que les détenus condamnés faisant partie de notre échantillon avaient attendu, en moyenne, 13 jours avant d’être évalués. Un détenu a même attendu 36 jours. Dans ce cas, le détenu a purgé 59 jours de détention sur les 90 jours auxquels il avait été condamné. Il est important que tous les détenus soient évalués dans les meilleurs délais, surtout lorsque l’on sait que la moyenne des peines purgées dans les deux établissements a été d’environ 75 jours pour l’exercice 2013-2014.

118. Nous avons aussi constaté que le Ministère n’avait pas utilisé l’outil d’évaluation prescrit par les directives sur les services correctionnels. Le personnel du Centre correctionnel de Baffin nous a informés que c’est parce qu’il n’y avait pas suffisamment d’employés qui avaient été formés pour l’utiliser. Des représentants du Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik nous ont indiqué qu’ils ne réalisaient pas les évaluations prescrites par les directives sur les services correctionnels. Ils nous ont expliqué que ces directives n’étaient pas adaptées à un établissement comme le leur. Nous avons constaté que le Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik effectuait plutôt une enquête de sélection qui permettait au personnel de se familiariser avec le détenu en vue de déterminer s’il pouvait être admis au Centre.

119. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait actualiser les directives et procédures opérationnelles régissant les évaluations des cas afin de les adapter au contexte opérationnel des établissements.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice s’emploie actuellement à réécrire la Loi sur les services correctionnels et son règlement afin de les actualiser et d’établir un texte fondateur. L’examen des politiques, des directives et des procédures opérationnelles en vigueur commencera au début de 2015.

Parallèlement à cet examen, le Ministère élaborera une stratégie de communication pour identifier et communiquer au personnel les répercussions des changements apportés sur les activités des établissements. Le Ministère communiquera les changements avant leur entrée en vigueur.

La stratégie décrira aussi la formation spécialisée requise, le cas échéant, pour mettre en œuvre les changements apportés aux procédures.

120. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait procéder à l’évaluation des détenus dans les meilleurs délais après leur admission afin de déterminer les programmes et services dont chaque détenu a besoin dans le cadre de sa réadaptation.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Il incombe aux gestionnaires ou aux administrateurs des établissements de s’assurer que les évaluations sont réalisées, et ce, en temps opportun. Une note de service sur la nécessité d’effectuer les évaluations dans les meilleurs délais et un calendrier des délais fixés seront envoyés d’ici la fin mars 2015.

Une demande de proposition sera lancée pour évaluer les programmes et services offerts actuellement et déterminer s’ils répondent aux besoins des détenus nunavummiuts et aux risques applicables au sein des établissements correctionnels du Nunavut. La demande de proposition prévoit aussi un examen des services psychologiques. Elle devrait être prête au début de 2015.

La création d’une fonction qui sera axée sur la conformité contribuerait à accroître la capacité de surveillance du ministère de la Justice. La réalisation des évaluations et l’élaboration de plans d’intervention pour les détenus feraient alors l’objet d’audits annuels.

121. Les plans d’intervention pour les détenus — Dans le cadre de la gestion de cas auprès des détenus, les directives sur les services correctionnels exigent qu’un plan d’intervention soit élaboré pour chaque détenu admis au sein d’un établissement (voir la pièce 5). Les plans d’intervention visent à encadrer les efforts déployés pour favoriser la réadaptation des détenus. Nous avons cependant constaté que le personnel du Centre de guérison de Rankin Inlet n’avait pas la formation nécessaire pour élaborer des plans d’intervention. Ces plans ont donc été élaborés au Centre correctionnel de Baffin.

122. Nous avons relevé de graves lacunes dans les plans d’intervention des détenus du Centre correctionnel de Baffin et du Centre de guérison de Rankin Inlet que nous avons examinés. Nous avons constaté qu’aucun des plans élaborés au Centre correctionnel de Baffin n’était complet; il y manquait des éléments clés. Par exemple, aucun des plans que nous avons examinés ne décrivait les objectifs pour répondre aux besoins des détenus, et seulement deux d’entre eux recommandaient des programmes et services adaptés à ces besoins. Nous avons aussi constaté que les progrès réalisés par les détenus par rapport aux plans élaborés étaient peu suivis (voir le paragraphe 143) et que la planification de la libération des détenus était limitée (voir le paragraphe 144). Par conséquent, les détenus n’avaient aucun plan d’intervention pour les aider dans le cadre de leur réadaptation et de leur réinsertion sociale.

123. De plus, les plans que nous avons examinés étaient souvent vagues et utilisaient le même libellé standard pour différents détenus. Des représentants du Ministère nous ont indiqué que les plans étaient peu utiles, car ils contenaient peu de renseignements propres à chaque détenu.

124. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait s’assurer que des plans sont élaborés pour encadrer la réadaptation de tous les détenus. Le Ministère devrait aussi s’assurer que les plans contiennent des recommandations relatives aux programmes de réadaptation adaptés aux besoins des détenus et sont assortis d’un plan de préparation à la libération afin d’aider les détenus à se préparer à leur retour dans la collectivité. Les progrès réalisés par rapport aux plans d’intervention devraient être documentés et suivis, et des ajustements devraient être apportés au besoin.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Depuis décembre 2014, un comité de gestion de cas a été créé en vue d’améliorer et de perfectionner le processus de gestion de cas pour tous les établissements. Cette tâche consiste notamment à cerner et à corriger les lacunes relatives aux pratiques en vigueur qui nuisent à l’élaboration de plans complets et à améliorer l’utilité des plans et la capacité de les adapter en vue du retour du détenu dans la collectivité.

Le comité s’emploiera à élaborer un manuel de gestion de cas qui sera remis aux membres du personnel. Ce manuel décrira en détail le processus de gestion de cas. Le comité sera chargé d’élaborer et de donner la formation connexe. Il incombera aux gestionnaires et aux administrateurs des centres correctionnels de faire appliquer le manuel et d’assurer sa mise en œuvre.

125. L’accès aux programmes de réadaptation — Aux termes de la Loi sur les services correctionnels, le Ministère est tenu d’offrir aux détenus des programmes qui favorisent leur réadaptation. Dès leur admission au Centre correctionnel de Baffin, les détenus reçoivent une liste des divers programmes offerts, notamment :

Le Centre de guérison de Rankin Inlet s’emploie encore à établir certains programmes, mais il en offre d’autres, notamment des programmes de lutte contre les dépendances et de soutien psychologique pour apprendre à maîtriser la colère. Les programmes offerts au Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik sont axés sur l’établissement d’une structure pour les détenus et la préparation à la vie active.

126. Nous avons constaté que les détenus n’avaient un accès adéquat à des programmes de réadaptation ni au Centre correctionnel de Baffin ni au Centre de guérison de Rankin Inlet.

127. De fait, 67 % des détenus du Centre correctionnel de Baffin dont nous avons examiné les dossiers avaient suivi certains programmes, sous une forme ou une autre, même si parfois cela se résumait à un seul cours. Par ailleurs, la plupart des détenus de notre échantillon de ce Centre avaient été diagnostiqués comme ayant des problèmes de toxicomanie ou d’alcoolisme. Malgré cela, les détenus du Centre n’ont pas eu accès à un programme de traitement de la toxicomanie ou de l’alcoolisme pendant plus de sept mois en 2012. Le programme a été offert deux fois entre janvier et septembre 2014.

128. Des représentants du Ministère nous ont informés qu’un certain nombre de facteurs peuvent limiter l’accès des détenus aux programmes offerts au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet.

129. Même si la participation des détenus aux programmes au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet est volontaire, nous avons constaté que le Ministère pourrait prendre certaines mesures pour faciliter l’accès à ces programmes.

130. Nous avons constaté que des plans de programmes n’avaient été élaborés ni pour le Centre correctionnel de Baffin ni pour le Centre de guérison de Rankin Inlet, comme l’exigent les services correctionnels. En plus d’établir le calendrier des cours et de déterminer les locaux et les ressources nécessaires ainsi que les coûts, les plans de programmes visent à définir les buts et objectifs de chaque programme et à fournir des indicateurs servant à évaluer l’efficacité des programmes. Sans plan de programmes, décrivant les ressources financières et humaines nécessaires pour assurer la prestation des programmes aux détenus, il a été difficile pour le personnel des deux centres de faire le suivi de l’accès aux programmes et de leur prestation.

131. Nous avons constaté que les établissements correctionnels disposaient d’un calendrier pour certains programmes, mais qu’il n’y avait pas de plan global d’affectation des ressources financières et humaines en vue de la mise en œuvre des programmes. Parfois, certains programmes n’ont pas pu être offerts en raison d’un manque d’animateurs. De plus, le Ministère n’a pas établi un calendrier de programmes pour répondre au mieux aux besoins de la population carcérale. Au cours de l’exercice 2013-2014, par exemple, les détenus ont été incarcérés environ 75 jours en moyenne au Centre correctionnel de Baffin ou au Centre de guérison de Rankin Inlet (voir le paragraphe 117). Nous avons cependant constaté qu’aucune stratégie n’avait été mise au point pour adapter les programmes en conséquence.

132. Nous avons aussi constaté que le Ministère n’avait pas déterminé si les programmes offerts répondaient aux besoins de l’ensemble de la population carcérale. Il n’a pas non plus revu les programmes offerts pour déterminer dans quelle mesure ils avaient contribué à la réadaptation des détenus. À l’heure actuelle, les programmes au Centre correctionnel de Baffin sont fondés sur des programmes existants ou du matériel provenant de sources extérieures, mais il est difficile de déterminer comment ils ont été adaptés en fonction des antécédents des détenus du Nunavut.

133. Nous avons constaté que le Centre correctionnel de Baffin offrait un programme destiné spécialement aux détenus ayant des problèmes de santé mentale graves. Ces détenus étaient incarcérés dans une unité distincte du Centre qui offrait un environnement mieux structuré. C’est le seul programme offert par le Centre qui était plus accessible et mieux adapté aux détenus souffrant de problèmes de santé mentale.

134. Nous avons également constaté que divers programmes culturels étaient offerts aux détenus incarcérés au Centre correctionnel de Baffin, au Centre de guérison de Rankin Inlet et au Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik, notamment :

Toutefois, des représentants du Ministère nous ont informés que les participants au programme de sculpture faisaient souvent l’objet de pressions de la part des autres détenus pour rapporter des objets interdits lors de leur retour au Centre. (Le Bureau de l’enquêteur correctionnel a formulé la même observation.) Par conséquent, plusieurs détenus refusaient de participer à ce programme, qui a cessé d’être offert.

135. Les détenus du Centre correctionnel de Baffin et du Centre de guérison de Rankin Inlet peuvent aussi se porter volontaires pour purger une partie de leur peine dans un camp éloigné. Ces camps visent à favoriser la guérison grâce à du counselling et à l’apprentissage de compétences traditionnelles. Selon les données du Ministère, les camps éloignés ont dans l’ensemble reçu, en moyenne, quatre détenus au cours de l’exercice 2013-2014, atteignant un maximum de huit détenus au cours de cet exercice. Au moment de notre audit, il y avait cinq camps en exploitation et le programme était doté d’un budget total pouvant atteindre 1 million de dollars. Un examen des camps réalisé en 2012 nous a permis de constater que le Ministère surveillait mal ce programme. Nous avons appris que le Ministère avait cerné certains changements qui devaient être apportés à la gestion du programme des camps éloignés, notamment améliorer la communication entre le gestionnaire du programme des camps, les établissements correctionnels et les exploitants des camps. Des représentants du Ministère ont récemment rencontré les exploitants des camps pour trouver des moyens d’améliorer le programme des camps éloignés.

136. Selon les directives sur les services correctionnels, il est primordial d’intégrer les principes et les valeurs de l’Inuit Qaujimajatuqangit (un terme inuktitut qui signifie « savoirs traditionnels inuits ») au système judiciaire. Les programmes culturels sont l’une des façons d’y arriver. Nous avons noté que les directives sur les services correctionnels donnaient certaines indications sur l’intégration des aspects de la culture inuite aux programmes, qui peut notamment se faire en ralliant les aînés et en offrant des programmes sur les terres. Cependant, les directives proposent peu d’indications sur la façon d’intégrer l’Inuit Qaujimajatuqangit à d’autres volets du système correctionnel.

137. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait recenser les besoins de la population carcérale du territoire et les risques qu’elle pose. Il devrait donner aux détenus un accès adéquat à des programmes de réadaptation qui sont adaptés à ces besoins et à ces risques.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Une demande de proposition sera lancée pour évaluer les programmes et les services offerts à l’heure actuelle et déterminer s’ils répondent aux besoins des détenus nunavummiuts et aux risques applicables au sein des établissements correctionnels du Nunavut. Elle devrait être prête au début de 2015.

138. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait mettre à jour ses directives et procédures opérationnelles afin d’y intégrer les principes et les valeurs de l’Inuit Qaujimajatuqangit.

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice amorcera un examen des politiques, des directives et des procédures opérationnelles en vigueur au début de 2015. L’examen visera expressément à favoriser l’intégration de l’Inuit Qaujimajatuqangit aux directives, aux politiques et aux procédures. De plus, des consultations seront menées auprès des collectivités.

Cette mise à jour des politiques sera accompagnée de l’élaboration d’une stratégie de communication visant à faire connaître les changements apportés au personnel avant qu’ils ne soient mis en œuvre et n’aient des répercussions sur les activités. Le Ministère déterminera également la formation spécialisée requise à cet égard et veillera à ce que le personnel la reçoive.

139. L’accès aux services de santé mentale — Nous avons constaté que le Centre correctionnel de Baffin offrait un programme destiné aux détenus ayant des problèmes de santé mentale graves (voir le paragraphe 133). Malgré tout, nous avons constaté que les détenus dont nous avons examiné les dossiers n’avaient pas bénéficié d’un accès adéquat aux services de santé mentale. Sur les 12 détenus de notre échantillon pour lesquels des services de suivi psychologiques avaient été recommandés, 2 seulement ont obtenu un renvoi en consultation auprès d’un psychologue et 2 ont pu voir un psychiatre à une reprise. Nous n’avons trouvé aucune preuve qui nous permet de conclure que ces détenus ont rencontré le psychologue.

140. Nous avons aussi constaté que les membres du personnel en mesure d’offrir du counselling ou d’autres services de soutien aux détenus était peu nombreux au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet. Les employés de ces deux centres, ainsi que ceux du Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik, nous ont indiqué que les services de santé mentale étaient inadéquats et ils nous ont fait part de leurs préoccupations quant au manque de soutien psychologique et de counselling offert aux détenus du Nunavut. Il faut savoir que les Services correctionnels n’emploient qu’un seul psychologue. Des représentants du Centre de guérison de Rankin Inlet nous ont indiqué que les détenus ne pouvaient pas consulter le psychologue, mais qu’ils pouvaient bénéficier des services d’aide communautaires.

141. L’absence de services de santé mentale adéquats entrave les efforts déployés par les détenus en vue de réussir leur réadaptation, car les problèmes à l’origine de leurs comportements criminels ne sont pas traités.

142. Recommandation — Le ministère de la Justice devrait :

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice examine actuellement les descriptions de tâche pertinentes et les organigrammes de l’organisation en vue de cerner les lacunes qui ont trait aux services et qui peuvent être corrigées immédiatement. Toutes les lacunes recensées en vue de mieux cibler les services de santé mentale qui peuvent être corrigées immédiatement le seront.

Le Ministère examine la possibilité de créer des partenariats avec d’autres ministères en vue d’accroître les ressources et d’améliorer ses ressources spécialisées et ses moyens de surveillance. Il collabore tout particulièrement avec les Services de santé mentale depuis mars 2014 en vue d’examiner la possibilité d’intégrer les niveaux de services qui pourraient être offerts aux personnes qui auront besoin d’aide lors de leur libération.

Une demande de proposition sera lancée pour évaluer les programmes et les services actuellement offerts et déterminer s’ils répondent aux besoins des détenus nunavummiuts et aux risques applicables au sein des établissements correctionnels du Nunavut. Cette demande de proposition prévoit aussi un examen des services psychologiques. Elle sera prête au début de 2015.

143. Le suivi des progrès réalisés par les détenus — Nous avons constaté que le suivi des progrès réalisés par les détenus à la fois au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet était limité (voir la pièce 5). En août 2013, le Centre de guérison de Rankin Inlet a commencé à établir les rapports mensuels sur les progrès réalisés requis. Cependant, certains gestionnaires de dossiers avaient encore besoin de formation sur la gestion de cas, notamment sur la façon d’établir les rapports mensuels. Des représentants du Ministère nous ont informés que même si des rapports sur les progrès n’étaient pas établis pour les détenus du Centre correctionnel de Baffin, des discussions sur les progrès réalisés avaient eu lieu lors des réunions hebdomadaires de la direction. Ces réunions n’ont cependant pas été documentées. Il importe pourtant de documenter les progrès réalisés, car ils témoignent de l’évolution des détenus tout au long de leur incarcération et permettent d’apporter des ajustements au besoin. Notre recommandation relativement à ce secteur d’examen est présentée au paragraphe 124.

144. La planification en vue de la libération des détenus — Nous avons constaté qu’il y avait eu peu de planification en vue de la libération des détenus au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet (voir la pièce 5). Il est pourtant important de bien planifier la libération des détenus en vue de favoriser leur réinsertion sociale dans la communauté. Nous avons aussi constaté que, même si les directives sur les services correctionnels soulignent l’importance de planifier la réinsertion sociale des détenus, elles contiennent peu d’indications sur la planification de la libération des détenus. Des représentants du Ministère nous ont indiqué que les agents correctionnels communautaires ne participaient pas actuellement à la gestion de cas auprès des détenus, bien que les représentants du Ministère prennent une première série de mesures en vue d’assurer la poursuite des soins pour les détenus qui sont libérés des établissements. Notre recommandation relativement à ce secteur d’examen est présentée au paragraphe 124.

Conclusion

145. Nous avons conclu que le ministère de la Justice ne s’était pas acquitté de ses principales responsabilités à l’égard des détenus au sein du système correctionnel. Nous avons conclu que le ministère de la Justice n’avait pas assuré une planification adéquate des établissements correctionnels ni veillé à leur bon fonctionnement. Il n’avait pas non plus assuré une gestion adéquate de la prise en charge des détenus, conformément aux principales exigences en matière de réadaptation et de réinsertion sociale.

À propos de l’audit

Le Bureau du vérificateur général a été chargé d’effectuer un examen indépendant des Services correctionnels du ministère de la Justice afin de donner de l’information, une assurance et des avis objectifs à l’Assemblée législative en vue de l’aider à examiner soigneusement la gestion que fait le gouvernement des ressources et des programmes.

Tous les travaux d’audit dont traite le présent rapport ont été menés conformément aux normes relatives pour les missions de certification de Comptables professionnels agréés (CPA) Canada qui sont présentées dans le Manuel de CPA Canada – Certification. Même si le Bureau a adopté ces normes comme exigences minimales pour ses audits, il s’appuie également sur les normes et pratiques d’autres disciplines.

Dans le cadre de notre processus d’audit, nous avons obtenu la confirmation de la haute direction que les constatations figurant dans le présent rapport sont fondées sur des faits.

Objectifs

L’audit avait pour objectif de déterminer si le ministère de la Justice s’acquittait de ses principales responsabilités à l’égard des détenus au sein du système correctionnel.

Dans le cadre de l’audit, nous avons vérifié si le ministère de la Justice avait :

Étendue et méthode

L’audit a porté essentiellement sur les Services correctionnels, car il s’agit des services du ministère de la Justice qui ont été chargés d’assurer la mise en œuvre de la Loi sur les services correctionnels. L’audit a visé deux aspects des services correctionnels : la gestion de certains établissements et la gestion de la prise en charge des détenus au sein de ces établissements.

Dans le cadre de l’audit, nous avons mené des entretiens avec des cadres supérieurs, des gestionnaires et des membres du personnel correctionnel du Ministère, ainsi que d’autres intervenants clés du secteur. Nous avons aussi rencontré les administrateurs, les administrateurs adjoints, les gestionnaires, des agents correctionnels et d’autres membres du personnel correctionnel de trois établissements : le Centre correctionnel de Baffin, le Centre de guérison de Rankin Inlet et le Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik.

De plus, nous avons passé en revue et analysé la documentation qui nous avait été communiquée par les établissements et le Ministère.

Pour déterminer si le Ministère avait assuré une gestion adéquate de la prise en charge des détenus, conformément à la Loi sur les services correctionnels et à certaines politiques et procédures clés en la matière, nous avons sélectionné au hasard et testé un échantillon de 39 détenus qui purgeaient des peines au Centre correctionnel de Baffin, au Centre de guérison de Rankin Inlet ou au Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik entre avril 2012 et mars 2014. Nous avons retenu le Centre correctionnel de Baffin et le Centre de guérison de Rankin Inlet, car il s’agit des deux plus grands établissements correctionnels du Nunavut, qui logent la plupart des détenus du territoire. Nous avons retenu le Centre résidentiel communautaire d’Uttaqivik en raison de son mandat de maison de transition. Les politiques et procédures clés que nous avons examinées sont notamment les exigences relatives à la gestion de cas qui visent à favoriser la réadaptation et la réinsertion sociale des détenus.

Pour déterminer si le ministère de la Justice avait assuré une planification adéquate des établissements correctionnels et veillé à leur bon fonctionnement, nous avons examiné les plans élaborés par le Ministère pour tous les établissements, y compris les prisons pour hommes, les prisons pour femmes et les centres de détention pour jeunes contrevenants.

Critères

Pour déterminer si le Ministère s’acquittait de ses principales responsabilités à l’égard des détenus au sein du système correctionnel, nous avons utilisé les critères suivants :

Critères Sources

Le ministère de la Justice élabore des plans pour recenser et combler les besoins actuels et à venir en matière d’incarcération des détenus.

  • Loi sur les services correctionnels
  • Référentiel des connaissances en gestion de projet, Institut de gestion de projet, 2008
  • Plan d’action Tamapta 2009-2013 (gouvernement du Nunavut)
  • Manuel de gestion financière du Nunavut

Le ministère de la Justice assure un suivi pour déterminer si les principales exigences visant à assurer la sécurité des détenus et du personnel sont respectées au sein des établissements.

  • Loi sur les services correctionnels
  • Règlement sur les services correctionnels
  • Directives sur les services correctionnels

Le ministère de la Justice :

  • s’assure de disposer du personnel nécessaire pour s’acquitter de ses principales responsabilités au sein des établissements correctionnels;
  • surveille et gère le recours aux heures supplémentaires au sein des établissements;
  • s’assure que le personnel suit la formation essentielle.
  • Directives sur les services correctionnels

Le ministère de la Justice s’assure que les inspections de prévention des incendies et les inspections sanitaires sont réalisées par les autorités compétentes, que les améliorations recommandées sont mises en œuvre et que les exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie sont menés comme il se doit.

  • Loi sur les services correctionnels
  • Règlement sur les services correctionnels
  • Directives sur les services correctionnels

Le ministère de la Justice assure la gestion de la prise en charge des détenus conformément aux politiques et aux procédures applicables :

  • en recensant leurs besoins et les risques qu’ils posent;
  • en leur donnant accès à des programmes et services qui sont adaptés à leurs besoins et aux risques qu’ils posent.
  • Loi sur les services correctionnels
  • Directives sur les services correctionnels

La direction a examiné les critères de l’audit et elle en a reconnu la validité.

Période visée par l’audit

L’audit a porté sur la période allant du 1er avril 2012 au 1er septembre 2014. Les travaux d’audit ont été terminés le 3 novembre 2014.

Équipe d’audit

Vérificateur général adjoint : Ronnie Campbell
Directeur principal : John Affleck
Directrice : Jo Ann Schwartz

Alexandre Boucher
Maria Pooley
Conal Slobodin
Kuluk Williams

Tableau des recommandations

Le tableau qui suit regroupe les recommandations formulées dans le présent rapport. Le numéro qui précède chaque recommandation correspond au numéro du paragraphe de la recommandation dans le rapport. Les chiffres entre parenthèses correspondent au numéro des paragraphes où le sujet de la recommandation est abordé.

La gestion des établissements correctionnels

Recommandation Réponse

48. Le ministère de la Justice devrait doter le territoire d’un nombre suffisant de places à sécurité maximale et s’assurer que les détenus de niveau de sécurité moyenne et les prévenus en détention provisoire sont incarcérés de manière adéquate, soit en faisant appel aux provinces ou à d’autres territoires, soit en construisant des établissements au Nunavut. (15-47)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. La construction du Centre Makigiarvik se poursuit et son ouverture est toujours prévue pour le printemps 2015. Même si ce Centre ne sera pas doté de places à sécurité maximale, son ouverture est une première mesure qui permettra d’accroître la capacité d’occupation.

Des plans sont établis pour évaluer la viabilité et les besoins en fonction du type d’incarcération : les détenus de niveau de sécurité moyenne et maximale et les prévenus en détention provisoire. Cette évaluation permettra d’actualiser les évaluations antérieures en mettant l’accent expressément sur la nécessité d’ajouter des places à sécurité maximale et d’évaluer la viabilité à long terme du Centre correctionnel de Baffin.

Les résultats de cette évaluation seront disponibles en avril 2015 et permettront au Ministère de prendre des décisions stratégiques éclairées concernant les essais et les concepts possibles pour l’exercice 2015-2016 en fonction des besoins actuels et à long terme des services correctionnels du Nunavut, notamment l’incarcération dans des conditions appropriées des Nunavummiuts sur le territoire ou dans les établissements des provinces ou d’autres territoires, au besoin.

L’objectif ultime est d’ajouter des places à sécurité maximale.

58. Le ministère de la Justice devrait surveiller la direction des établissements pour assurer le respect des politiques, des directives et des procédures opérationnelles visant le placement en isolement des détenus et les fouilles des cellules et des aires communes. (50-57)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice procédera à un examen de la dotation, sur le plan fonctionnel et sur le plan organisationnel, au sein des Services correctionnels avant juin 2015 afin de recenser les lacunes en matière de services et de capacité.

Le Ministère créera au sein des Services correctionnels une fonction qui sera axée sur le suivi et la conformité, sous réserve des résultats de l’examen de la dotation et de l’approbation du budget nécessaire. De telles fonctions existent déjà dans la majorité des services correctionnels du Canada. Cette fonction contribuera à assurer la conformité aux politiques et procédures et fera des suivis et mènera des enquêtes au besoin.

Le Ministère s’emploie actuellement à réécrire la Loi sur les services correctionnels et son règlement afin de les actualiser et d’établir un texte fondateur. L’examen des politiques, des directives et des procédures opérationnelles en vigueur commencera au début de 2015 et coïncidera avec l’examen de la Loi sur les services correctionnels.

59. Le ministère de la Justice devrait analyser les tendances en matière de contrebande d’objets interdits, notamment les types d’objets dont il est question et leur mode d’entrée dans l’établissement. (53-57)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice consigne les incidents liés à des objets interdits dans le Système de gestion des délinquants (SGD) informatisé depuis 2000. Les tests sur une version actualisée du SGD devaient débuter avant la fin de janvier 2015. Cette nouvelle version permettra au Ministère de repérer les données sur la contrebande et de les extraire en vue de faire une analyse des tendances. Dès que la mise en œuvre de la nouvelle version dans l’environnement d’essai sera réussie, une version permanente sera instaurée. Une fois que le Ministère disposera de cette nouvelle version, il pourra analyser les tendances en matière de contrebande.

66. Le ministère de la Justice devrait, en collaboration avec le ministère des Services communautaires et gouvernementaux, prendre des mesures correctives pour régler tous les cas de non-conformité relevés au Centre correctionnel de Baffin dans les rapports d’inspection de prévention des incendies et les rapports externes. (61-65)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice collabore actuellement avec le ministère des Services communautaires et gouvernementaux en vue de corriger tous les cas de non-conformité relevés dans les rapports d’inspection de prévention des incendies et les rapports externes, particulièrement au Centre correctionnel de Baffin. Il continuera de collaborer avec le ministère des Services communautaires et gouvernementaux en vue de respecter l’obligation de procéder à des inspections régulières et d’établir des plans d’entretien. Des fonds ont déjà été débloqués et des plans établis pour évaluer la viabilité et les besoins en fonction de la capacité des infrastructures actuelles du territoire, notamment les lacunes existantes. Les résultats de cette évaluation seront disponibles en avril 2015 et nous permettront de déterminer les solutions les plus efficaces et efficientes pour corriger les manques à combler et les lacunes actuelles.

69. Le ministère de la Justice devrait s’assurer que la direction du Centre correctionnel de Baffin mène les exercices d’évacuation d’urgence requis. Il devrait documenter les exercices et prendre les mesures nécessaires pour corriger les lacunes, au besoin. (67-68)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Depuis qu’il a été avisé de la situation par le Bureau du vérificateur général, le ministère de la Justice a pris des mesures pour s’assurer que des exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie sont menés au Centre correctionnel de Baffin et qu’ils continueront à être menés régulièrement dans tous les établissements. En novembre 2014, un système électronique de suivi et de planification a été instauré. Il permet d’envoyer des préavis à chaque établissement sur les exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie à mener. Un suivi des progrès est réalisé afin de s’assurer que les exercices d’évacuation sont réalisés et documentés selon les délais prescrits.

Une note de service a été envoyée aux administrateurs et aux gestionnaires en janvier 2015 pour préciser les exigences applicables et souligner l’importance de mener les exercices d’évacuation obligatoires. Tous les établissements correctionnels du Nunavut sont équipés de copies d’un calendrier standard d’évacuation. Les lacunes relevées dans les rapports sur les exercices réalisés seront corrigées.

En 2015, le Ministère compte créer une fonction qui sera chargée de faire le suivi de la conformité afin d’avoir une assurance supplémentaire grâce à des moyens de surveillance renforcée dans ce secteur.

79. Le ministère de la Justice devrait examiner comment le Centre de guérison de Rankin Inlet pourrait mieux combler les besoins du système correctionnel du territoire en matière de capacité et s’assurer que le personnel du Centre est mieux formé. (70-78)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Pour mieux répondre à la demande de places dans les centres correctionnels et combler les besoins en matière de services correctionnels de la région de Kivalliq, le Centre de guérison de Rankin Inlet accepte désormais directement certains détenus de Rankin Inlet et des collectivités avoisinantes.

Les admissions directes au Centre de guérison de Rankin Inlet seront possibles pour les prévenus qui auront fait l’objet d’une évaluation récente du classement ou pour ceux qui seront gardés en transit en attendant leur transfèrement au Centre correctionnel de Baffin pour leur évaluation initiale.

Une conférence de la haute direction aura lieu au début de 2015. Pendant cette conférence, le Ministère définira la vision et la mission du Centre de guérison de Rankin Inlet. Des discussions auront alors lieu pour déterminer les mesures qui pourraient être prises pour s’assurer que cet établissement soit pleinement exploité, notamment la possibilité de doter le Centre de moyens supplémentaires pour procéder à l’évaluation du classement des détenus.

En décembre 2014, un comité de gestion de cas a été chargé d’identifier les besoins en formation et d’élaborer un manuel de formation. La mise en œuvre d’une nouvelle version du Système de gestion des délinquants informatisé au sein du Ministère permettra d’avoir davantage de moyens pour surveiller et extraire les données relatives à la formation des membres du personnel. Dès que ce système sera élaboré, il sera utilisé pour surveiller la formation suivie par tous les membres du personnel et s’assurer que le personnel reçoit la formation obligatoire.

82. Le ministère de la Justice devrait s’assurer que le Centre de guérison de Rankin Inlet dispose d’une vision documentée pour mener ses activités et que cette vision guide l’exploitation du Centre. (80-81)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le Ministère de la Justice a prévu de tenir une conférence de la haute direction au début de 2015. Pendant cette conférence, le Ministère définira la vision et la mission du Centre de guérison de Rankin Inlet. Au fur et à mesure que nous avancerons, ces énoncés seront revus pour s’assurer qu’ils correspondent toujours aux besoins du territoire.

85. Le ministère de la Justice devrait surveiller la direction du Centre de guérison de Rankin Inlet pour assurer le respect des politiques, des directives et des procédures opérationnelles régissant le placement en isolement des détenus. (84)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. D’ici la fin mars 2015, une note de service précisant les pratiques exemplaires en matière de placement en isolement et contenant la politique pertinente à cet égard sera envoyée à tous les établissements correctionnels.

La révision de toutes les directives et politiques correctionnelles commencera au début de 2015.

Afin d’assurer le respect de ces importantes politiques, le ministère de la Justice s’efforcera de créer une fonction axée sur la conformité. Cette fonction contribuera au suivi de la conformité aux politiques de gestion des établissements correctionnels, surtout en ce qui a trait au placement en isolement.

87. Le ministère de la Justice devrait s’assurer que la direction du Centre de guérison de Rankin Inlet mène les exercices d’évacuation d’urgence requis. Il devrait documenter les exercices et prendre les mesures nécessaires pour corriger les lacunes, au besoin. (86)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Depuis que le ministère de la Justice a été avisé de la situation par le Bureau du vérificateur général, des exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie seront menés tous les trimestres au Centre de guérison de Rankin Inlet.

Le Ministère a pris des mesures pour s’assurer que ces exercices continueront d’être menés tous les trimestres. Un système électronique de suivi et de planification a été instauré. Il permet d’envoyer des préavis à chaque établissement sur les exercices d’évacuation d’urgence et d’évacuation en cas d’incendie à mener. Un suivi des progrès est réalisé afin de s’assurer que les exercices d’évacuation sont réalisés et documentés selon les délais prescrits.

Une note de service, accompagnée d’une copie des politiques pertinentes, a été envoyée en décembre 2014 à l’ensemble des établissements pour préciser les exigences applicables et souligner l’importance de mener les exercices d’évaluation obligatoires. Tous les établissements correctionnels du Nunavut seront équipés de copies d’un calendrier standard d’évacuation.

En 2015, le Ministère compte créer une fonction qui sera chargée de faire le suivi de la conformité, afin d’avoir une assurance supplémentaire grâce à des moyens de surveillance renforcée dans ce secteur.

100. Le ministère de la Justice devrait :

  • procéder à une analyse approfondie de ses besoins en matière de dotation au Centre correctionnel de Baffin et au Centre de guérison de Rankin Inlet;
  • pourvoir les postes vacants en recrutant le nombre nécessaire d’employés à temps plein, d’employés permanents et d’employés occasionnels pour répondre aux besoins des centres;
  • déterminer le seuil acceptable d’heures supplémentaires pouvant être effectuées et faire respecter ce seuil en faisant un suivi du recours aux heures supplémentaires et en le gérant au moyen des données disponibles. (88-99)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Les Services correctionnels collaboreront avec le ministère des Finances pour mener une analyse approfondie de la dotation en personnel, notamment des besoins de chaque établissement. Cette évaluation sera amorcée avant juin 2015.

Le Ministère a lancé, en novembre 2014, une vaste campagne de recrutement multimédia pour les Services correctionnels, qui met l’accent sur le recrutement de bénéficiaires et l’éducation du public. Vers la fin de 2014, le Ministère a aussi mené des initiatives de communication avec les communautés à Pangnirtung, à Cape Dorset, à Pond Inlet, à Qikiqtarjuaq et à Clyde River. Ces initiatives de communication ont connu un franc succès et le Ministère élargira ses initiatives de recrutement dans les communautés à d’autres localités à l’avenir.

Il est prévu que l’examen de la dotation de juin 2015 contienne un volet qui sera consacré à l’examen du recours aux heures supplémentaires dans les établissements correctionnels du Nunavut. Créer de nouveaux postes permanents à temps plein au sein des établissements devrait favoriser la réduction de la majeure partie des dépenses actuelles au titre des heures supplémentaires.

102. Le ministère de la Justice devrait élaborer et utiliser un système de suivi efficace pour s’assurer que les membres du personnel reçoivent la formation obligatoire. (101)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Une version actualisée du Système de gestion des délinquants (SGD) informatisé du Ministère devrait commencer à être testée d’ici à la fin de janvier 2015. Cette nouvelle version du Système permettra au ministère de la Justice d’entrer, de faire le suivi et d’extraire des données relatives à la formation des membres du personnel. Dès que la mise en œuvre de la nouvelle version du Système dans l’environnement d’essai sera réussie, une version permanente sera instaurée. Le Système sera utilisé pour surveiller la formation suivie par tous les membres du personnel et pour s’assurer que l’ensemble du personnel reçoit la formation obligatoire.

La gestion de cas auprès des détenus

Recommandation Réponse

119. Le ministère de la Justice devrait actualiser les directives et procédures opérationnelles régissant les évaluations des cas afin de les adapter au contexte opérationnel des établissements. (115-118)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice s’emploie actuellement à réécrire la Loi sur les services correctionnels et son règlement afin de les actualiser et d’établir un texte fondateur. L’examen des politiques, des directives et des procédures opérationnelles en vigueur commencera au début de 2015.

Parallèlement à cet examen, le Ministère élaborera une stratégie de communication pour identifier et communiquer au personnel les répercussions des changements apportés sur les activités des établissements. Le Ministère communiquera les changements avant leur entrée en vigueur.

La stratégie décrira aussi la formation spécialisée requise, le cas échéant, pour mettre en œuvre les changements apportés aux procédures.

120. Le ministère de la Justice devrait procéder à l’évaluation des détenus dans les meilleurs délais après leur admission afin de déterminer les programmes et services dont chaque détenu a besoin dans le cadre de sa réadaptation. (115-118)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Il incombe aux gestionnaires ou aux administrateurs des établissements de s’assurer que les évaluations sont réalisées, et ce, en temps opportun. Une note de service sur la nécessité d’effectuer les évaluations dans les meilleurs délais et un calendrier des délais fixés seront envoyés d’ici la fin mars 2015.

Une demande de proposition sera lancée pour évaluer les programmes et services offerts actuellement et déterminer s’ils répondent aux besoins des détenus nunavummiuts et aux risques applicables au sein des établissements correctionnels du Nunavut. La demande de proposition prévoit aussi un examen des services psychologiques. Elle devrait être prête au début de 2015.

La création d’une fonction qui sera axée sur la conformité contribuerait à accroître la capacité de surveillance du ministère de la Justice. La réalisation des évaluations et l’élaboration de plans d’intervention pour les détenus feraient alors l’objet d’audits annuels.

124. Le ministère de la Justice devrait s’assurer que des plans sont élaborés pour encadrer la réadaptation de tous les détenus. Le Ministère devrait aussi s’assurer que les plans contiennent des recommandations relatives aux programmes de réadaptation adaptés aux besoins des détenus et sont assortis d’un plan de préparation à la libération afin d’aider les détenus à se préparer à leur retour dans la collectivité. Les progrès réalisés par rapport aux plans d’intervention devraient être documentés et suivis, et des ajustements devraient être apportés au besoin. (121-123)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Depuis décembre 2014, un comité de gestion de cas a été créé en vue d’améliorer et de perfectionner le processus de gestion de cas pour tous les établissements. Cette tâche consiste notamment à cerner et à corriger les lacunes relatives aux pratiques en vigueur qui nuisent à l’élaboration de plans complets et à améliorer l’utilité des plans et la capacité de les adapter en vue du retour du détenu dans la collectivité.

Le comité s’emploiera à élaborer un manuel de gestion de cas qui sera remis aux membres du personnel. Ce manuel décrira en détail le processus de gestion de cas. Le comité sera chargé d’élaborer et de donner la formation connexe. Il incombera aux gestionnaires et aux administrateurs des centres correctionnels de faire appliquer le manuel et d’assurer sa mise en œuvre.

137. Le ministère de la Justice devrait recenser les besoins de la population carcérale du territoire et les risques qu’elle pose. Il devrait donner aux détenus un accès adéquat à des programmes de réadaptation qui sont adaptés à ces besoins et à ces risques. (125-136)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Une demande de proposition sera lancée pour évaluer les programmes et les services offerts à l’heure actuelle et déterminer s’ils répondent aux besoins des détenus nunavummiuts et aux risques applicables au sein des établissements correctionnels du Nunavut. Elle devrait être prête au début de 2015.

138. Le ministère de la Justice devrait mettre à jour ses directives et procédures opérationnelles afin d’y intégrer les principes et les valeurs de l’Inuit Qaujimajatuqangit. (136)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice amorcera un examen des politiques, des directives et des procédures opérationnelles en vigueur au début de 2015. L’examen visera expressément à favoriser l’intégration de l’Inuit Qaujimajatuqangit aux directives, aux politiques et aux procédures. De plus, des consultations seront menées auprès des collectivités.

Cette mise à jour des politiques sera accompagnée de l’élaboration d’une stratégie de communication visant à faire connaître les changements apportés au personnel avant qu’ils ne soient mis en œuvre et n’aient des répercussions sur les activités. Le Ministère déterminera également la formation spécialisée requise à cet égard et veillera à ce que le personnel la reçoive.

142. Le ministère de la Justice devrait :

  • évaluer les méthodes utilisées pour orienter les détenus vers les services de santé mentale et faire des suivis pour s’assurer que les détenus reçoivent les services recommandés;
  • revoir et, au besoin, accroître les moyens dont il dispose pour s’assurer que les détenus souffrant de troubles mentaux reçoivent les services de counselling et de soutien psychologique dont ils ont besoin. (139-141)

Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Le ministère de la Justice examine actuellement les descriptions de tâche pertinentes et les organigrammes de l’organisation en vue de cerner les lacunes qui ont trait aux services et qui peuvent être corrigées immédiatement. Toutes les lacunes recensées en vue de mieux cibler les services de santé mentale qui peuvent être corrigées immédiatement le seront.

Le Ministère examine la possibilité de créer des partenariats avec d’autres ministères en vue d’accroître les ressources et d’améliorer ses ressources spécialisées et ses moyens de surveillance. Il collabore tout particulièrement avec les Services de santé mentale depuis mars 2014 en vue d’examiner la possibilité d’intégrer les niveaux de services qui pourraient être offerts aux personnes qui auront besoin d’aide lors de leur libération.

Une demande de proposition sera lancée pour évaluer les programmes et les services actuellement offerts et déterminer s’ils répondent aux besoins des détenus nunavummiuts et aux risques applicables au sein des établissements correctionnels du Nunavut. Cette demande de proposition prévoit aussi un examen des services psychologiques. Elle sera prête au début de 2015.

 

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